- L’emploi a plafonné en février.
- Le taux de chômage est resté stable parce que la population active a baissé.
- La croissance des salaires s’est accélérée.
- Les heures de travail, qui ont plombé le PIB de février, relèveront le PIB du T1.
- La météo explique probablement en partie la léthargie des emplois et des heures de travail.
- C’est surtout à cause des facteurs de désaisonnalisation faussés qu’il faut ignorer ce rapport.
- La BdC devrait ne pas en tenir compte, ce qui n’a, d’une manière ou d’une autre, aucune importance pour la décision à rendre la semaine prochaine.
- L’emploi au Canada, en milliers sur un mois/taux de chômage en %, en données désaisonnalisées, février 2025 :
- Données réelles : 1,1/6,6
- Banque Scotia : 20/6,7
- Consensus : 20/6,7
- Auparavant : 76/6,6
Le marché de l’emploi au Canada a été beaucoup plus vigoureux que ce que laisse entendre la modeste variation de synthèse des emplois (+1,1 k emplois). Le facteur de désaisonnalisation le plus faible dans les annales est soumis à une approche d’estimation biaisée. En outre, la météo a joué un rôle important dans l’évolution à la baisse des emplois, des heures de travail et du bassin de main-d’œuvre, ce dont Statistique Canada aurait peut‑être dû prendre en compte dans son facteur de désaisonnalisation.
Dans l’ensemble, je ne crois pas que la Banque du Canada sera inquiétée par ces chiffres. Ou du moins, il y a tout lieu de croire qu’elle ne le saura pas. Elle abaissera donc probablement les taux la semaine prochaine pour les mettre au neutre, compte tenu des effets pervers de l’incertitude. Tiff Macklem sera probablement sur ses gardes sur l’influence de ce biais.
Je vais parler d’abord des chiffres, puis des raisons pour lesquelles on ne devrait pas tenir compte de ce rapport.
Les détails — Grande ampleur de la léthargie
Le Canada n’a créé que 1 100 emplois le mois dernier. Le graphique 1 comprend certains détails.

L’Ontario a été la seule province à inscrire une croissance importante de l’emploi. Toutes les autres provinces ont essentiellement connu un calme plat.
Les emplois à temps plein ont reculé d’environ 20 k; l’emploi à temps partiel a augmenté essentiellement d’autant.
Dans le secteur privé, les emplois salariés ont mené le bal (+10 k); dans le secteur public, ils ont augmenté de l’ordre de 8 k, dont la moitié revient aux fonctionnaires.
Le travail autonome a perdu 17 k travailleurs, ce qui est la raison pour laquelle il ne faut pas tenir compte de la léthargie des chiffres de synthèse sur l’emploi. De nombreux emplois autonomes sont indispensables. Pour ma part, je les considère toujours comme des données de moindre qualité que les emplois salariés.
Le graphique 2 fait état de la répartition parmi les différents secteurs. Les gains essentiellement enregistrés dans le commerce de détail et le commerce de gros ont eu très peu d’ampleur, ce qui pourrait se répercuter sur le prochain rapport, puisque l’expiration du congé de TPS et de TVH pourrait avoir une plus grande influence. La plupart des secteurs n’ont pas bougé. Les baisses importantes, surtout dans deux secteurs, ont eu peu d’ampleur.

Le taux de chômage n’a pas évolué, à 6,6 %. En effet, la population active a perdu 17 k travailleurs; c’est pourquoi la régression du bassin des travailleurs actifs a compensé l’anémie des données de synthèse sur l’emploi. Le taux de participation a flanché de deux dixièmes à 65,3 % pour inscrire le chiffre le plus léthargique en quatre mois. Il s’agit de la première baisse de la taille de la population active des travailleurs actifs ou à la recherche d’un emploi depuis septembre 2022, et du recul le plus important depuis juin 2022, tous dans les premiers jours volatils du rebond pandémique. Je ne sais pas trop pourquoi. Le ralentissement de l’immigration produit peut‑être finalement ses effets puisqu’on s’y attendait depuis des mois. Ou peut-être que les travailleurs, devenus pessimistes, restés coincés dans la neige ou aux prises avec d’autres facteurs, ont cessé de chercher.
Les heures de travail ont accusé le coup (graphique 3). Elles ont fléchi de 1,3 % sur un mois en données désaisonnalisées. Elles inscrivent un gain de 1,4 % sur un trimestre en rythme désaisonnalisé et annualisé jusqu’à maintenant au T1 (graphique 4). Les heures de travail sont donc négatives pour le PIB de février; or, elles suivent toujours une orientation favorable pour le PIB du T1, puisque le PIB est le résultat de la multiplication des heures par la productivité de la population active. Le PIB canadien a pu compter sur un regain de productivité au T4, alors que le PIB du T1 profite d’un relèvement des heures de travail.

La croissance des salaires a explosé pour inscrire le gain le plus important depuis octobre (graphique 5). Les salaires ont gagné 6,1 % sur un mois en données désaisonnalisées et en rythme annualisé en février. Cette hausse n’est pas suffisante pour enrayer le fléchissement tendanciel des quatre derniers mois; elle est toutefois suffisante pour remettre en question sa durabilité.

LA MÉTÉO A DÉPRIMÉ LA CROISSANCE DE L’EMPLOI
Parlons maintenant des raisons pour lesquelles il faut ignorer ce rapport. D’abord, Statistique Canada fait savoir que les tempêtes de neige expliquent la baisse des heures de travail en février. La neige en février au Canada? Allons donc, c’est épouvantable. Mais sérieusement, si vous en avez été témoin, les précipitations de neige ont été ridiculement beaucoup plus importantes que celles des années précédentes. Voici ce qu’a déclaré Statistique Canada :
« En raison de tempêtes hivernales importantes, des régions du centre et de l'est du Canada ont été ensevelies sous la neige pendant la semaine de référence de l'EPA (du 9 au 15 février). Au total, 429 000 employés ont perdu des heures de travail pendant une partie de la semaine en raison des conditions météorologiques (données non désaisonnalisées). Ce nombre est plus de quatre fois supérieur au nombre moyen d'employés qui ont perdu des heures de travail en raison des conditions météorologiques en février au cours des cinq dernières années (96 000). »
Je pense que la météo a probablement ralenti la croissance de l’emploi dans certains secteurs qui sont sans doute sensibles au temps qu’il fait, par exemple les restaurants et les bars, l’information, la culture et les loisirs ainsi que la construction, entre autres.
Les facteurs de désaisonnalisation ne valent rien
Le graphique 6 nous apprend que le facteur de désaisonnalisation appliqué par Statistique Canada a été le plus faible pour tous les mois de février dans les annales. Les facteurs de désaisonnalisation sont calculés d’après un fort biais de récence, qui privilégie par les résultats techniques des dernières années. Tous les facteurs les plus faibles dans les annales portent sur les années récentes, et on ne sait pas vraiment pourquoi. Il se pourrait que ce soit en partie attribuable à la chronologie des chocs de la pandémie sur l’économie, aux soubresauts dans la reprise de l’activité économique et aux mesures de relance. Il se pourrait qu’il s’agisse d’une tendance en quelque sorte plus approfondie puisque les facteurs de désaisonnalisation étaient relativement plus léthargiques même dans les années qui ont précédé la pandémie.

Le graphique 7 indique que le chiffre anémique de l’emploi ne s’explique pas vraiment par la variation en chiffres non désaisonnalisés. Cette anémie est en quelque sorte normale pour un mois de février. C’est pourquoi l’application d’un facteur de désaisonnalisation atomique dans les annales pour le mois de février a été le principal facteur de la léthargie du chiffre des emplois en rythme désaisonnalisé.

Ce qu’il y a aussi de curieux, c’est qu’on ne sait pas pourquoi le jugement de Statistique Canada n’est pas prépondérant par rapport à ce que lui apprennent ses modèles de facteurs de désaisonnalisation, surtout dans un mois où la neige et la météo en général ont été nettement pires qu’un mois de février normal.
Dans quelle mesure s’agit‑il d’un enjeu important? Le graphique 8 indique que peu importe le facteur de désaisonnalisation, sauf le facteur historiquement faible cette fois, le Canada aurait inscrit une importante croissance de l’emploi.

En bref, la météo et ce qui constitue à mon avis des facteurs de désaisonnalisation probablement peu fiables sont deux très bonnes raisons de reléguer ce rapport aux oubliettes. Il faut dire aussi que l’emploi accuse un décalage sur la conjoncture; c’est pourquoi il faudrait prioriser nettement plus les débats prospectifs, par exemple en se demandant si la politique commerciale américaine reviendra à la raison et dans quelle mesure elle pourrait influer à terme sur la croissance tendancielle de l’emploi.
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