LE MARCHÉ CANADIEN DU LOGEMENT : L’ATTENTISME DES ACHETEURS EST APPELÉ À PERDURER
RÉSUMÉ
Essentiellement, la conjoncture n’a pas changé en août par rapport à juillet pour le marché national de la revente. Les ventes nationales de logements ont gagné 1,3 % en août (en chiffres désaisonnalisés), alors que les nouvelles inscriptions ont progressé de 1,1 %. Par conséquent, le ratio des ventes sur les nouvelles inscriptions — indicateur de la fermeté du marché de la revente — a légèrement augmenté pour passer de 52,9 % en juillet à 53 % en août. Cet indicateur se situe toujours en zone de conjoncture équilibrée (soit entre 44,7 % et 66,1 %); cette situation prime depuis presque toute la durée écoulée depuis avril 2022.
La très légère baisse du nombre de mois de stock, qui est passé de 4,2 à 4,1 mois, est une autre indication que la conjoncture de la revente n’a pas vraiment évolué en août par rapport à juillet. Or, cet indicateur est toujours en deçà de sa moyenne à long terme (d’avant la pandémie) de 5,3 mois. Comme dans les mois précédents, on relève d’importantes variations dans l’ensemble des provinces du point de vue des écarts de cet indicateur par rapport à sa moyenne à long terme; elles sont comprises entre plus de quatre mois de moins dans les provinces de l’Atlantique et moins de deux semaines de plus en Colombie-Britannique et en Ontario.
La conjoncture du marché — mesurée d’après le ratio des ventes sur les nouvelles inscriptions — s’est durcie dans 15 des marchés que nous suivons et s’est assouplie dans les 16 autres. Le nombre de marchés équilibrés a fléchi pour passer de 22 en juillet à 19 en août — ce qui veut dire qu’encore plus de la moitié des marchés sont équilibrés — alors que le nombre de marchés favorables aux acheteurs a augmenté pour passer de quatre à sept au cours de cette période.
Les ventes ont progressé, en août par rapport à juillet, dans près de 60 % des marchés que nous surveillons, alors que les nouvelles inscriptions ont augmenté dans presque les deux tiers de ces marchés. La hausse la plus importante des ventes mensuelles a été constatée à Lethbridge (+22,9 % en données désaisonnalisées sur un mois), et la deuxième en importance a été relevée à Regina (+10 %). Cette forte hausse mensuelle des ventes à Lethbridge, de concert avec une augmentation plus modeste des nouvelles inscriptions pour la même période (+2,7 %), a permis au marché de la revente d’avancer en territoire favorable aux vendeurs, pour porter son ratio des ventes sur les nouvelles inscriptions de 75,9 % en juillet à 90,8 % en août. Pour Regina, la plus forte hausse des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions pour cette durée (qui ont augmenté respectivement de 10 % et de 6,9 %) est aussi venue durcir la conjoncture du marché de la revente de cette ville, sans toutefois que ce soit suffisant pour la placer en territoire favorable aux vendeurs.
C’est à Peterborough (‑15,6 % en données désaisonnalisées) qu’on a comptabilisé la plus forte baisse des ventes en août par rapport à juillet, alors que les nouvelles inscriptions dans cette ville ont reculé de 8,6 % : il s’agit de la deuxième baisse en importance dans les nouvelles inscriptions après Thunder Bay (‑11 %). Parce que les ventes ont plus fortement baissé que les nouvelles inscriptions à Peterborough, la conjoncture du marché de cette ville, qui se situait en territoire équilibré, a plongé en territoire favorable aux acheteurs en août par rapport à juillet. Au cours de la même période à Thunder Bay, cette brusque baisse de nouvelles inscriptions, de concert avec une hausse de 2,3 % des ventes, a fait passer en territoire favorable aux vendeurs son marché de la revente auparavant en territoire équilibré.
L’indice des prix des propriétés (IPP) MLS est resté inchangé en août par rapport à juillet (en chiffres désaisonnalisés) et a fléchi de 3,9 % en août 2024 par rapport à août 2023 (en chiffres non désaisonnalisés). La stabilité relative de cet indice des prix depuis décembre 2023 s’est donc maintenue en août. La légère hausse mensuelle de cet indice pour les habitations d’un étage (+0,1 % sur un mois en données désaisonnalisées) en août a été entièrement effacée par la modeste baisse comptabilisée pour les maisons en rangée (-0,2 %). En août, cet indice a gardé sa valeur de juillet pour les habitations de deux étages et les appartements. Or, tous ces types de logements ont concouru à l’affaissement de cet indice des prix du logement depuis août 2023, ce qui cadre avec l’assouplissement de la conjoncture du marché du logement depuis le début de 2022 ou depuis que les taux directeurs des banques centrales ont commencé à monter en flèche.
CONSÉQUENCES
Comme pour les mois précédents, nous nous attendons toujours à une reprise du marché de la revente et nous prévoyons que la conjoncture de ce marché se durcira, de sorte que les prix‑baromètres des logements recommenceront à suivre leur tendance haussière. Si les ventes ont augmenté en août, il est toutefois encore trop tôt pour affirmer que cette reprise s’est amorcée compte tenu du caractère volatil des indicateurs mensuels du logement et parce que les ventes n’ont pas évolué considérablement depuis l’été 2023, alors que le ratio des ventes sur les nouvelles inscriptions a essentiellement régressé au cours de cette période.
Certes, la normalisation attendue des taux directeurs des banques centrales — déjà entamée au Canada et qui devrait, selon nos prévisions, commencer ce mois‑ci aux États-Unis — est une bonne nouvelle pour le marché du logement. Toutefois, le niveau d’abordabilité toujours très faible des propriétés nouvellement achetées, même en tenant compte de la baisse constatée des taux de crédit hypothécaire, fait souffler de forts vents contraires sur la demande de logements et sur le marché de la revente. Les acheteurs potentiels veulent probablement attendre que les taux de crédit hypothécaire baissent encore et se rapprochent de leur niveau d’étiage cyclique avant d’accroître considérablement leur demande.
Pour alourdir cette incertitude, le gouvernement du Canada a annoncé aujourd’hui que le délai d’amortissement des primo‑accédants passera à 30 ans (contre 25 à l’heure actuelle) et que le plafond de prix des prêts hypothécaires assurés passera à 1,5 million de dollars (contre un million de dollars). Ces changements entreront en vigueur le 15 décembre 2024.
Ces mesures viendront certes étayer la demande de logements lorsque ces nouveaux paramètres prendront effet; or, elles pourraient aussi prolonger l’attentisme actuel jusqu’à la fin de l’année, ce qui pourrait retarder la reprise attendue. Cette évolution pourrait effectivement générer une demande de logements plus forte qu’escompté lorsque ces changements produiront leurs effets, ce qui laisse entendre qu’à partir du printemps 2025, les baisses prévues du taux directeur de la Banque du Canada risquent d’être plus lentes qu’escompté. Mais à l’évidence, cette évolution réglementaire augmentera les pressions qui font monter les prix des logements à moyen et à long termes compte tenu de la forte pénurie structurelle existante de l’offre, qui devrait perdurer dans l’avenir prévisible.
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