• Compte tenu de l’ambitieuse intervention monétaire à mener pour mater la flambée sans précédent de l’inflation, les marchés redoutent de plus en plus le risque d’une récession au Canada. Nous croyons que le risque d’une récession reste faible à l’heure actuelle, puisque nous nous attendons à une forte croissance cette année et l’an prochain même si le taux directeur prévu devrait s’établir à 3 % au début de 2023.
  • À notre avis, c’est dans les prévisions de l’inflation que réside le principal risque baissier pour le pronostic. D’après nos prévisions actuelles, l’inflation s’établira à une moyenne d’environ 6 % cette année et de 3 % l’an prochain. La flambée de l’inflation aurait pour effet d’éroder encore plus les revenus réels et obligerait à rehausser les taux d’intérêt, ce qui pénaliserait la croissance dans un cas comme dans l’autre.
  • En faisant appel à notre modèle macroéconométrique, nous estimons que l’inflation à un peu plus de 7 % dans le deuxième semestre cette année donnerait lieu à une récession induite par la politique monétaire au deuxième semestre de 2023 puisque la Banque du Canada devrait hausser son taux directeur à 4,25 % pour ramener l’inflation sur sa cible de 2 %.
  • Nous explorons aussi le choc d’une éventuelle récession portée par la demande sur le rythme du durcissement de la politique monétaire. Si la Banque du Canada savait avec certitude qu’il y aurait une récession en 2023, il lui suffirait de hausser à 2 % son taux directeur d’ici la fin de cette année et de le maintenir à ce niveau.

La conjoncture économique mondiale a été fortement malmenée par la guerre en Ukraine. De concert avec la reprise en compte des attentes vis‑à‑vis des taux directeurs dans certains pays, cette situation amène de plus en plus d’analystes à lancer des mises en garde sur les risques d’une récession. Nous considérons que ces risques sont faibles au Canada; toutefois, d’autres surprises à la hausse pour l’inflation pourraient changer cette évaluation. Au moment d’écrire ces lignes, notre modèle des probabilités de récession continue de pointer un très faible risque de récession au Canada dans les quatre prochains trimestres.

L’économie canadienne est vigoureuse. Les fondamentaux restent solides, comme en font foi, entre autres, une balance commerciale très favorable, la demande refoulée très élevée, les bilans sains des ménages, le quasi‑plein‑emploi sans précédent et des paramètres monétaires toujours exceptionnellement stimulants. Pour ces raisons, les perspectives sont très solides jusqu’en 2023 selon les normes statistiques. Par contre, l’inflation est loin d’être de bon augure. Elle continue de faire exploser les prévisions qui ne cessent d’être relevées et créent ainsi de l’incertitude, en réduisant le pouvoir d’achat et en concourant à ce qui sera probablement une normalisation rapide de la politique monétaire au Canada et ailleurs.

D’après le Modèle macroéconomique mondial de la Banque Scotia, nous estimons qu’un choc chronique supplémentaire de l’ordre de 1 % de l’inflation déclencherait une récession dans le deuxième semestre de 2023.

Nous tenons également compte de ce qu’il faudra sans doute à la BdC pour hausser les taux d’intérêt beaucoup moins que prévu à l’heure actuelle. Sauf une baisse rapide évidente de l’inflation, une récession causée par un choc sur la demande, modélisée dans une amplification de la guerre en Ukraine, aurait pour effet de porter les taux directeurs à 2 % beaucoup plus graduellement.

LA QUANTIFICATION DU SEUIL INFLATION‑RÉCESSION

Pour connaître ce seuil inflation‑récession, nous adoptons les hypothèses suivantes dans la modélisation :

1) Les contraintes imposées par la pandémie dans l’offre mondiale perdurent jusqu’au T3 de 2023 (soit une année de plus que nos prévisions de base).

2) Ces contraintes qui pèsent sur l’offre mondiale se répercutent sur l’indice PMI des délais de livraison des fournisseurs, qui est compris dans nos équations inflationnistes, avec une plus forte élasticité que les prévisions de base.

3) Les attentes inflationnistes sont désarrimées de la cible : les agents établissent leurs attentes inflationnistes en s’en remettant entièrement au comportement récent de l’inflation et à l’inflation attendue, plutôt qu’à la cible de 2 %, en raison des écarts tenaces récents par rapport à la cible. Notre récent rapport vient confirmer que c’est déjà le cas, puisque les attentes inflationnistes sont déjà désarrimées depuis la fin de 2021. (Veuillez cliquer sur ce lien.)

4) Par conséquent, les banques centrales, déjà en retard sur la courbe, doivent réagir plus vigoureusement pour corriger le déficit inflationniste dans la conduite de leur politique monétaire par rapport au scénario de base.

Cette conjoncture débouche sur un ralentissement de l’activité économique, ce qui fait plonger le marché boursier et les cours du pétrole — et ce qui exacerbe, dans un cas comme dans l’autre, la récession.

Les graphiques 1 à 4 reproduisent le seuil conséquent inflation‑récession et son impact sur la croissance économique et sur les profils des taux directeurs nominaux et réels. Au Canada, l’inflation chronique, qui atteint 7,25 % dans le deuxième semestre cette année, porte le taux directeur nominal de la politique monétaire à un pic compris entre 4 % et 4,25 % (contre 3 % dans nos prévisions de base) et freine la croissance économique entre le T3 de 2023 et le T1 de 2024. Un taux d’inflation supérieur à ce seuil provoquerait au T3 de 2023 une récession induite par la politique monétaire.


UNE NOUVELLE ESCALADE DE LA GUERRE EN UKRAINE POURRAIT RALENTIR LE RYTHME DU DURCISSEMENT MONÉTAIRE

Une récession en 2022, causée par les faits nouveaux imprévisibles dans l’évolution du conflit opposant la Russie et l’Ukraine, percuterait les taux directeurs. Il s’agirait alors d’un scénario stagflationniste : la hausse des cours des produits de base et la multiplication des contraintes de la chaîne logistique en raison de la guerre donneraient lieu à une légère récession dans le deuxième semestre cette année. Cette récession est appelée à être modérée, en raison de l’exposition limitée du Canada à la guerre et de son statut d’exportateur net de produits de base, qui profite de la hausse des cours des produits de base.

Les profils conséquents de croissance, d’inflation et de taux sont représentés dans les graphiques 5 à 8. Cette récession poserait un risque énorme pour nos prévisions sur les taux directeurs, malgré le caractère stagflationniste du choc, qui fait en sorte que le profil inflationniste reprend essentiellement notre scénario de base. Puisque la récession se produirait dès le début du T3 de 2022, la banque centrale peut se permettre aujourd’hui de bloquer ses hausses de taux, ce qui amoindrirait considérablement le caractère ambitieux de nos prévisions sur l’intervention monétaire. Toutefois, les taux directeurs devront quand même augmenter puisque l’inflation augmente elle aussi. C’est pourquoi dans ce scénario, le taux directeur nominal monte lentement pour passer de 1,0 % à seulement 1,5 % d’ici la fin de 2022, pour atteindre 2 % à la fin de 2023.


En reprenant le même choc sur la demande, nous calibrons une récession en 2023. Cette récession est plus profonde que celle évoquée dans la section précédente, puisque notre scénario de croissance de base en 2023 est plus faible que celui de 2022. Les graphiques 9 à 12 font état de l’impact produit sur nos profils de taux directeurs. Les résultats indiquent que les taux devraient continuer d’augmenter aujourd’hui pour enrayer les pressions inflationnistes, mais un peu moins ambitieusement. Dans ce scénario, les taux s’établissent à 2 % à la fin de 2022, avant de plonger en 2023. C’est pourquoi, même si la banque centrale s’attendait l’an prochain à une récession de la demande, les pressions inflationnistes sont trop invasives pour justifier la décision d’abandonner le durcissement monétaire.


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