Entreprises

Perspectives du secteur immobilier commercial au Canada

Le secteur de l’immobilier commercial a connu une transformation remarquable au cours des trois dernières années, dans la foulée de la pandémie de COVID-19. Malgré l’incertitude et la volatilité subséquentes des fondamentaux de l’ensemble des marchés immobiliers, certaines catégories d’actifs se sont avérées particulièrement résilientes. Il s’agit notamment des immeubles multifamiliaux et industriels, des installations d’entreposage libre-service et des immeubles de commerce de détail dont les locataires offrent des services essentiels, comme les épiceries ou les pharmacies. D’autres types d’immeubles, notamment les bureaux et les centres commerciaux fermés, sont en cours de transition en réponse à l’évolution des préférences des employés et des consommateurs.

Au Canada, les activités d’investissement sont demeurées élevées tout au long de la pandémie en raison de la faiblesse des taux d’intérêt, de la régularité des apports en capitaux et de l’augmentation des occasions de création de valeur et des occasions liées à des projets en difficulté. Les préoccupations émergentes autour de l’inflation, de la hausse des taux d’intérêt et de la menace d’une récession imminente ont réduit le volume des investissements dans l’immobilier commercial sur l’ensemble du premier trimestre de 2023. Il s’agit maintenant de savoir si ce ralentissement sera temporaire ou durable.

Essor du secteur industriel

Avant le début de la pandémie, le Canada accusait un retard considérable par rapport aux autres pays dans l’adoption généralisée du commerce électronique. Le taux de pénétration du commerce électronique s’est accéléré et dépasse maintenant 20 %, soit plus du double de son niveau d’avant la crise, ce qui place le Canada au même rang que les États-Unis(1). Résultat : les fournisseurs de services logistiques et les entreprises de commerce électronique dominent l’activité totale des nouvelles locations dans le secteur des immeubles industriels depuis 2019(2). L’investissement dans l’automatisation et la robotique devrait s’accélérer au cours des prochaines années, les occupants tirant parti de la tendance à la construction sur mesure dans le secteur du développement industriel.

Les occupants accordent de plus en plus d’importance à l’emplacement afin de surmonter les difficultés causées par la pénurie de main-d’œuvre et les coûts de transport élevés. De nombreux employeurs déclarent avoir du mal à recruter des travailleurs pour répondre à la demande croissante, et la possibilité d’implanter des installations à proximité de bassins de main-d’œuvre représentera un avantage concurrentiel majeur pour le recrutement et la fidélisation des employés. De plus, les coûts de transport des marchandises ont augmenté durant la pandémie, ce qui a entraîné une hausse des prix du fret à l’échelle nationale et internationale. Compte tenu de l’environnement macroéconomique et géopolitique, on s’attend à ce que de nombreux occupants privilégient une implantation à proximité des centres de population à forte densité.

Les conditions du marché restent extrêmement tendues partout au pays, le taux de disponibilité étant actuellement de 1,6 %. Sur le marché canadien des immeubles industriels, l’absorption nette positive a été de 10,4 millions de pieds carrés au quatrième trimestre de 2022, ce qui porte le total annuel à 35,8 millions de pieds carrés (le deuxième niveau le plus élevé jamais enregistré). Alors que les taux de disponibilité se maintiennent à des niveaux historiquement bas, les taux de location nets continuent d’augmenter. Le taux de croissance des loyers a atteint le niveau record de 30,9 % à l’échelle nationale en 2022, ce qui porte à 14,5 % le taux de croissance annuel composé sur cinq ans(2).

 

Tous les principaux marchés des immeubles industriels ont atteint de nouveaux sommets pour les taux de location nets au cours du dernier trimestre de 2022. C’est dans le marché de Vancouver que les loyers sont actuellement les plus élevés au Canada, avec une moyenne de 20,21 $ par pied carré. Suivent les marchés de Toronto et d’Ottawa, où les loyers moyens s’élèvent respectivement à 17,81 $ et à 13,67 $ par pied carré. Sur douze mois, ce sont les marchés de Toronto (26,5 %), de Vancouver (21,2 %) et de Montréal (19,6 %) qui ont affiché la croissance des taux de location la plus élevée(3).

Taux de location et taux de disponibilité des principaux marchés

Taux de location par pied carré

Graph of Major Market Rental Rates and Availability

Source : Groupe Altus

La demande énorme pour des locaux industriels ces dernières années a porté les fondamentaux du marché à des niveaux records. Comme la plupart des principaux marchés ont peu d’espace disponible à offrir, une partie importante de la demande n’est pas satisfaite. Les options seront limitées pour les occupants qui ont besoin d’espace à court terme, et la concurrence sera forte là où des occasions se présentent. Tant que le déséquilibre entre l’offre et la demande ne sera pas atténué, le resserrement des conditions du marché devrait continuer à faire grimper les taux de location, les prix de vente et la valeur des terrains partout au Canada.

Bureau ou télétravail

Selon Statistique Canada, le nombre de Canadiens travaillant exclusivement à domicile a été multiplié par trois entre 2016 et 2021, ce qui montre à quel point les entreprises et les employés se sont adaptés aux restrictions imposées durant la pandémie en matière de rassemblement et de mobilité. Bien que de nombreux experts aient prédit que les employés retourneraient à leur lieu de travail à mesure que les restrictions seraient assouplies, la plupart des employeurs continuent d’offrir des structures de travail entièrement à distance ou hybrides.

À l’échelle nationale, la réduction de la demande pour des espaces de bureaux qui découle de cette situation a fait passer le taux d’inoccupation des bureaux à 17,1 % au quatrième trimestre de 2022, un bond de 790 points de base depuis le premier trimestre de 2020. Par ailleurs, c’est au quatrième trimestre que le marché canadien des immeubles de bureaux a enregistré son plus mauvais résultat en 2022, avec une absorption nette négative de 2,1 millions de pieds carrés et une augmentation importante des taux d’inoccupation dans la plupart des principaux marchés(4). Bien que les promoteurs aient généralement suspendu leurs projets de construction de nouveaux immeubles de bureaux, la finalisation de ceux entamés pendant le dernier cycle de développement a pour conséquence qu’environ 4 millions de pieds carrés de bureaux devront être livrés au cours des deux ou trois prochaines années uniquement à Toronto, ce qui risque d’exacerber les conditions actuelles.

Offre et demande de bureaux dans les principaux marchés

Absorption nette et offre additionnelle (en millions de pieds carrés)

Graph of Major Market Office Supply vs. Demand

Source : Groupe Altus

Bien que le télétravail et le travail hybride feront encore partie de la structure opérationnelle de bon nombre d’entreprises dans un avenir prévisible, plus de 57 % des Canadiens étaient déjà de retour au bureau en 2022(5). Pour inciter les employés à revenir, les propriétaires et les employeurs conçoivent de nouvelles façons de revigorer les immeubles de bureaux et les espaces communs afin de créer des environnements collaboratifs qui intègrent plus facilement les nouvelles pratiques commerciales et de communication. On a constaté une augmentation de la demande pour des espaces de bureaux qui offrent de meilleures infrastructures humaines, numériques et physiques et qui mettent en œuvre les technologies et les innovations les plus récentes en matière d’immeubles intelligents dans le but d’améliorer l’expérience globale en milieu de travail. Les entreprises espèrent que ces infrastructures permettront d’accroître le travail en présentiel afin d’améliorer le processus de formation des nouveaux employés, de faciliter la collaboration et la cohésion, et de renforcer la culture d’entreprise à long terme.

Demande résidentielle

Stimulée en grande partie par la reprise d’une forte immigration, la demande pour les logements locatifs dans les centres urbains devrait s’accélérer dans la plupart des grands marchés en 2023(6). Le nombre total d’immigrants est passé de 184 500 en 2020 à 437 000 en 2022, un record(7). Cette tendance semble s’installer dans la durée : les restrictions sur les voyages internationaux se sont assouplies, un financement de 85 millions de dollars a été promis pour aider à éliminer les retards dans le traitement de quelque deux millions de dossiers d’immigration et le gouvernement fédéral a renouvelé son engagement à augmenter les seuils d’immigration, avec l’objectif d’accueillir près de 1,5 million de nouveaux résidents permanents entre 2022 et 2024(7).

Comme on s’attend à ce que près de 60 % des immigrants soient admis dans le cadre de programmes économiques, la plupart de ces nouveaux Canadiens devraient s’établir dans les centres urbains, là où se trouvent les occasions d’emploi(7). La demande pour des logements urbains devrait aussi être dynamisée par le retour des étudiants dans les établissements d’enseignement postsecondaire et par le retour des employés de bureau qui avaient migré vers les banlieues ou vers des marchés moins coûteux pendant la pandémie.

Le taux d’inoccupation des appartements au Canada a baissé pour atteindre 1,9 % en 2022, son niveau le plus bas en plus de deux décennies, ce qui s’explique par l’afflux de nouveaux résidents qui a exercé une pression supplémentaire sur l’offre et par la valeur élevée des maisons qui a empêché de nombreux Canadiens d’accéder à la propriété. Avec le resserrement du marché locatif, le taux de location annuel moyen à l’échelle nationale a augmenté de 18,2 % lors d’un changement de locataire (contre une augmentation moyenne de 2,8 % lors d’un renouvellement de bail). À Vancouver, Halifax et Toronto et dans plusieurs marchés secondaires de l’Ontario, le prix de location annuel moyen a augmenté de plus de 20 % lors des changements de locataire(6).

Une pression à la hausse importante et soutenue sur les coûts du logement a donné lieu au pays à ce que de nombreux experts appellent la crise de l’abordabilité du logement. La dernière fois que le logement a été abordable au Canada (à moins de 30 % du revenu avant impôts d’un ménage), c’était en 2004. En 2022, la proportion du revenu avant impôts des ménages allouée au logement a atteint le niveau record de 62,7 % à l’échelle nationale, et plusieurs grands marchés ont largement dépassé ce niveau, notamment Vancouver (95,8 %), Toronto (85,2 %) et Victoria (71,7 %)(8).

Le tableau suivant met en évidence la pénurie de l’offre à l’échelle provinciale :

Province

Niveau d’abordabilité cible en 2030

Offre additionnelle de logements requise

Ontario

37 %

1 850 000

Québec

32 %

620 000

Colombie-Britannique

44 %

570 000

Manitoba

30 %

260 000

Saskatchewan

30 %

100 000

Terre-Neuve-et-Labrador

30 %

60 000

Nouvelle-Écosse

31 %

50 000

Alberta

30 %

20 000

Nouveau-Brunswick

30 %

-

Île-du-Prince-Édouard

30 %

-

Total

 

3 530 000

Source: SCHL

La baisse de l’abordabilité peut être principalement attribuée à un parc de logements qui n’a pas suivi la croissance de la demande dans la plupart des grandes zones urbaines du Canada au cours des 20 dernières années. L’inflation des coûts de construction, la hausse des prix des terrains et l’allongement des délais d’obtention des permis ont rendu la construction d’immeubles de logements locatifs plus difficile et moins intéressante financièrement pour de nombreux promoteurs canadiens, limitant ainsi l’offre de nouveaux logements. Actuellement, la construction d’appartements locatifs ne représente que 5,2 % du parc de logements au pays, un taux insuffisant pour répondre à l’augmentation prévue de la demande. Au rythme actuel des nouvelles constructions, le parc de logements devrait augmenter de 2,3 millions d’unités d’ici 2030, ce qui portera le nombre total de logements au Canada à 19 millions; toutefois, pour rétablir l’abordabilité, il faudra construire 3,5 millions d’unités de logement supplémentaires en plus des unités dont la construction est déjà prévue(6).

Groupe de courtage immobilier de la Banque Scotia 

Le Groupe de courtage immobilier de la Banque Scotia donne des conseils sur l’acquisition et la cession de biens immobiliers commerciaux au nom de ses clients. Le Groupe possède une expertise dans toutes les principales catégories d’actifs (bureaux, commerces de détail, immeubles multifamiliaux, immeubles industriels et terrains à aménager) ainsi que dans les catégories d’actifs non traditionnelles, notamment les centres de données et les studios de cinéma. Il entretient des relations de longue date avec un grand nombre d’investisseurs de premier plan (institutionnels, publics et privés) dans le secteur de l’immobilier commercial. Outre la vente d’actifs, il offre des services-conseils en évaluation, en structuration de coentreprises, en placements de capitaux privés et en financement. Pour plus d’informations sur les services du Groupe de courtage immobilier, contactez :

Peter Zorbas
Directeur général et chef, Courtage immobilier, Banque Scotia
peter.zorbas@scotiabank.com