LE MARCHÉ CANADIEN DU LOGEMENT : PRUDENCE, INABORDABILITÉ ET BAISSES DE TAUX
RÉSUMÉ
En novembre, les ventes de logements au Canada ont perdu 0,9 % (en données désaisonnalisées sur un mois). Les nouvelles inscriptions ont emboîté le pas, en doublant ce recul (1,8 %). Cette baisse plus importante des inscriptions par rapport aux ventes ne fait que durcir légèrement le ratio des ventes sur les nouvelles inscriptions, indicateur de la tension du marché, qui est resté à un creux depuis 10 ans. Ce ratio s’inscrit aujourd’hui à 49,8 %, ce qui est nettement inférieur à son récent pic d’avril, soit 68,3 % (sans oublier son pic de plus de 80 % en janvier 2022) et ce qui est moindre que sa moyenne à long terme de 55,2 %. Ce léger durcissement a quand même fait rebasculer le marché national en territoire équilibré. Le marché comptabilise 4,2 mois d’inventaire — contre 3,1 en mai; il reste toutefois inférieur à sa moyenne à long terme, de l’ordre de 5 mois. Dans les provinces de l’Atlantique, les mois d’inventaire sont compris entre 4 et 6 mois de moins que les moyennes à long terme de cette région.
On relève une répartition presque égale entre les marchés dont les ventes ont augmenté et ceux dont les ventes n’ont pas progressé. Les ventes ont décollé dans 16 des 31 marchés que nous suivons, n’ont pas bougé dans deux marchés et ont baissé dans les autres. Il faut signaler les hausses dans les deux chiffres, de 14 % et plus, sur les marchés de l’Ontario, dont Peterborough, Barrie, Hamilton-Burlington et St. Catherines, ce dernier marché ayant progressé de plus de 24 %, alors que Saint John a couronné le palmarès du mois, avec une hausse de près de 38 %. Ces hausses ont été entièrement effacées par les baisses moindres (14 % et moins) dans les grands marchés comme Québec, Winnipeg, Kitchener-Waterloo, Okanagan-Mainline, la vallée du Fraser et Vancouver. En novembre, le niveau des ventes a accusé une baisse de 14 % sur le niveau moyen de 2010-2019 observé pour ce mois.
Par ailleurs, la baisse des inscriptions a été plus généralisée. Le nombre de propriétés nouvellement inscrites a plongé dans presque les deux tiers des marchés que nous suivons. Sur les 19 marchés dont les inscriptions ont baissé, 11 font partie de l’Ontario — ce qui n’est guère étonnant puisqu’il s’agit de la région qui mène jusqu’à maintenant les baisses de prix parce que les ventes sont malmenées par les prix élevés, ce qui décourage les vendeurs d’inscrire leurs propriétés. Avant que les inscriptions nouvelles prennent du mieux en octobre et novembre, les hausses inscrites entre mai et septembre, pour une moyenne mensuelle de l’ordre de 5 %, avaient porté les inscriptions à des niveaux qui cadrent avec les moyennes observées à long terme. Les récentes baisses ont fait plonger le niveau des inscriptions de novembre à 2 % de moins que la moyenne de 2010-2019 observée pour ce mois.
Les prix mesurés selon l’indice des prix des propriétés (IPP) MLS ont cédé 1,1 % (en données désaisonnalisées sur un mois) en novembre : il s’agit de la troisième baisse mensuelle d’affilée et du repli mensuel le plus important. On a toutefois relevé des différences régionales, puisque les prix ont augmenté dans plus de la moitié des marchés locaux que nous suivons, ce qui a été éclipsé par les baisses accusées ailleurs. Malgré ces baisses, les prix restent nettement supérieurs à ce qu’ils étaient avant la pandémie, et certains marchés, à savoir Calgary, le Grand Moncton, Québec et Saskatoon, continuent de surpasser les niveaux de février 2022, soit le mois avant le début des hausses de taux de la Banque du Canada, ce qui a marqué le début d’une correction d’un an dans le marché du logement. La baisse mensuelle de novembre a été menée par les habitations unifamiliales (-1,2 %), talonnées par les habitations en rangée (-0,9 %) et les appartements (-0,7 %).
CONSÉQUENCES
Dans les derniers mois, l’évolution du marché du logement au Canada s’est déroulée sous le signe de la prudence et de l’inabordabilité. La prudence a été de mise parce que l’incertitude plane et que les acheteurs potentiels attendent que l’économie et les prix des logements adoptent une orientation plus claire. L’inabordabilité s’explique par les taux d’intérêt élevés, qui empêchent certains acheteurs de répondre aux conditions du crédit hypothécaire en raison des prix élevés des logements à l’heure actuelle, qui se situent toujours aux alentours de 36 % de plus que ce qu’ils étaient avant la pandémie malgré les rajustements à la baisse dont nous avons été témoins dans les deux dernières années. Voilà pourquoi le marché du logement s’est ralenti, sans surprise, puisqu’à l’heure actuelle, de nombreux candidats à l’accès à la propriété misent sur les baisses de taux attendues l’an prochain. On peut donc espérer finalement une reprise de la demande et une remontée des prix lorsque s’amorcera le cycle tant attendu de la baisse des taux, ou avant ce cycle. Il sera compliqué de gérer une répétition de ce qui s’est produit au début de l’année lorsque la certitude perçue à propos de la fin du cycle des hausses de taux a déclenché une reprise du marché trop hâtive pour être rassurante, ce qui a donné lieu à d’autres hausses durant l’été.
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