- L’issue de la présidentielle américaine reste un coup de dés. Puisque dans cette campagne, l’ex‑président Trump priorise les politiques commerciales et que la menace des tarifs douaniers essentiels à sa plateforme économique perdure, il est quasiment certain que l’incertitude qui pèse sur les politiques commerciales se multipliera s’il est élu.
- En faisant appel à un indice de volatilité des marchés d’après les politiques commerciales, nous mesurons les effets économiques de l’incertitude liée au commerce dans le cadre d’une éventuelle deuxième présidence Trump. L’incertitude liée au commerce a considérablement culminé durant son premier mandat, ce qui continue de représenter une source d’inquiétude majeure dans la prochaine élection.
- En raison de l’incertitude qui continue de planer sur les politiques commerciales dans un éventuel deuxième mandat de Donald Trump, ce qui reprendrait les niveaux élevés d’incertitude constatés dans son premier mandat, le PIB américain pourrait baisser d’un point de pourcentage complet à la fin de son mandat par rapport à un scénario dans lequel il n’y a pas de multiplication de l’incertitude, ce qui aurait des effets d’entraînement importants sur l’économie canadienne.
- Ce recul projeté de la production s’explique uniquement par l’incertitude qui plane sur les politiques commerciales et est différent de l’impact des mesures officielles effectives qui pourraient être mises en œuvre dans le gouvernement de M. Trump, dont les tarifs douaniers, les baisses d’impôts et les déportations. Ces mesures, soit essentiellement les tarifs douaniers, sont inflationnistes, alors que l’incertitude liée au commerce elle-même est désinflationniste, puisqu’elle amoindrit la demande et les investissements.
L’issue de la présidentielle américaine est très incertaine. Certains économistes, dont nous sommes, ont analysé les conséquences potentielles d’une victoire de la vice‑présidente Harris ou de l’ex‑président Trump. Cette note est consacrée à un aspect sous‑analysé de l’environnement post‑électoral : l’incertitude qui plane sur les politiques commerciales. Compte tenu des déclarations des deux candidats, il est tout à fait évident que l’approche de M. Trump dans les questions commerciales serait plus disruptive et créerait plus d’incertitude. Cette incertitude a marqué son premier mandat au pouvoir (graphique 1) et il est probable qu’elle caractérise son deuxième mandat s’il remporte la victoire. Selon un article du Financial Times, le prochain secrétaire d’État potentiel de Trump a déclaré : « La prévisibilité est quelque chose d’épouvantable. Évidemment, l’autre parti réclame la prévisibilité. Trump n’est pas prévisible, et c’est ce que les Américains aiment bien. »
Selon l’article signé par Adam S. Posen pour les Affaires étrangères, il s’agit d’une dérogation aux candidatures présidentielles traditionnelles — stratégie qui met l’accent sur l’incertitude plutôt que sur la stabilité macroéconomique dans l’ensemble. Il avertit que « [l’]approche Trump, par contre, instrumentalise l’incertitude. Or, l’incertitude est une arme difficile à manier, et elle se retourne sur celui ou celle qui la dégaine sans discernement ».
Dans cette note, nous avons voulu quantifier l’impact économique de cette incertitude. Nous faisons appel à l’indice des politiques commerciales pour la volatilité des marchés boursiers (VMB) — sous‑indice de l’indice de la VMB qui capte la volatilité liée à l’incertitude sur les politiques commerciales. Cet indice est construit d’après le dénombrement mensuel des occurrences de termes spécifiques se rapportant à l’incertitude sur les politiques commerciales dans 11 grands quotidiens américains et concorde assez bien avec l’indice largement consulté sur la volatilité des marchés, soit l’indice VIX, de même qu’avec la volatilité des rendements des valeurs du S&P 500.
À l’approche de l’élection de 2016, cet indice a commencé à augmenter lorsque dans ses promesses électorales, Trump a priorisé des politiques commerciales protectionnistes (graphique 1). Lorsque Trump est entré en fonction en 2017 et qu’il a commencé à mettre en œuvre son programme commercial, notamment en se retirant du Partenariat transpacifique, en renégociant l’ALÉNA et en vantant et imposant les tarifs douaniers, cet indice a atteint des sommets sans précédent et est resté élevé pendant la durée de sa présidence, surtout au zénith des tensions commerciales avec la Chine. Compte tenu de son comportement relativement stable avant 2016, nous considérons que cet indice est un bon baromètre de l’« effet d’incertitude Trump ».
Le commerce continue de représenter un grand motif d’incertitude dans les jours qui précèdent la prochaine présidentielle américaine. Les principaux partenaires commerciaux se préparent à la possibilité de nouveaux tarifs douaniers sur toutes les importations destinées aux États-Unis : on proposait initialement des tarifs de 10 %, et à une époque plus récente, on a suggéré de les porter à 20 % dans l’ensemble, en imposant un éventuel tarif de 60 % sur les biens chinois. Compte tenu des conséquences économiques et inflationnistes négatives de l’application de tarifs généralisés, nous ne croyons pas qu’il mettra nécessairement en œuvre ces tarifs aussi vigoureusement et généralement qu’il le laisse entendre à l’heure actuelle. Imposera‑t‑il des tarifs douaniers ou non? S’il le fait, comment et quand les appliquera‑t‑il? Il y a deux grands motifs d’incertitude à affronter si M. Trump remporte cette élection. Nous constatons déjà que cette incertitude se répercute sur l’indice de la VMB pour les politiques commerciales, qui a explosé pour s’inscrire à 0,9 au T3 de 2024, soit près du double de son niveau du trimestre précédant l’élection de 2016, ce qui cadre avec un discours protectionniste plus ambitieux.
L’incertitude élevée qui plane sur les politiques commerciales donne lieu à un coût économique. Nous nous étions penchés sur cette question dans son premier mandat en estimant empiriquement l’impact de l’incertitude sur les politiques commerciales dans le Modèle macroéconomique mondial des Études économiques de la Banque Scotia (MMMBS). À l’époque, nous avions estimé que si la brusque augmentation de l’incertitude sur les politiques commerciale perdurait pendant le mandat présidentiel, elle aurait pu amoindrir de 0,8 % en 2020 le PIB américain par rapport à un scénario dans lequel l’incertitude se situait à sa moyenne statistique. Les résultats nous ont également appris que cette incertitude aurait un effet considérable sur l’économie canadienne par le truchement des canaux du commerce, du taux de change, des primes de risque et de la richesse financière, ce qui donne pour le PIB canadien un niveau de 0,7 % de moins qu’en 2020 par rapport à un scénario sans incertitude. Dans cette note, nous répliquons le comportement de l’indice dans le premier mandat de Trump à partir du T1 de 2025 jusqu’à la fin du T4 de 2028 (graphique 2). En raison du point de départ supérieur au T3 de 2024 par rapport au T3 de 2016, nous laissons l’indice dériver légèrement au‑dessus de ses niveaux du début de 2017 dans le premier semestre de 2025. En exécutant notre MMMBS avec ce profil pour l’indice de l’incertitude sur les politiques commerciales, nous générons, pour le PIB réel des États-Unis, une prévision inférieure à notre prévision référentielle, qui se fonde sur un indice stable de l’incertitude sur les politiques commerciales (graphique 3), avec un impact au pic d’une perte de 1 % de la production économique au T3 de 2028. Le PIB du Canada baisserait aussi de 0,7 % à la fin de son mandat. Dans ce scénario, le PIB réel des deux pays continuerait d’augmenter, mais moins que dans le scénario d’une moindre incertitude. Ce résultat cadre avec le poids qui pèse sur l’activité économique en raison de la forte volatilité des marchés, d’une conjoncture difficile pour l’investissement et d’une planification opérationnelle entravée sur fond de mutations imprévisibles des politiques.
Ce recul projeté de la production économique, qui s’explique exclusivement par l’incertitude sur les politiques commerciales, doit être envisagé distinctement de l’ensemble de l’impact économique d’une deuxième présidence potentielle de Trump. Nous relevons le paradoxe dans ce cas : le PIB et l’inflation fléchissent lorsque l’incertitude augmente parce qu’on s’inquiète d’un impact tarifaire qui serait inflationniste. Si M. Trump ne brandit que la menace tarifaire, l’impact sur l’activité cadrerait avec les constats de cette note. S’il adopte l’ensemble des politiques de sa plateforme, dont les tarifs douaniers, leur impact net aura manifestement pour effet de hausser l’inflation.
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