Parmi les multiples chapeaux que porte Onye Nnorom figure – sauf en temps de pandémie – celui de médecin de famille sur appel à Toronto. Or, pour elle, les visites à domiciles s’accompagnent souvent d’une source de stress de microagression. Même lorsqu’elle se présente stéthoscope au cou, le patient est parfois dubitatif. « On me demande où j’ai étudié la médecine, où je travaille, et à quel point j’ai dû travailler fort pour avoir de très hautes notes – tout ça pendant que j’examine l’enfant ou le malade. »

 « Il n’y a pas de doute qu’au quotidien, les médecins noirs subissent de la discrimination, parfois subtile, mais pas toujours, de la part des gestionnaires, collègues et patients », affirme la Dre Nnorom, qui tente aussi d’éliminer ce problème en tant que présidente de la Black Physicians’ Association of Ontario (BPAO – l’association des médecins noirs de l’Ontario)… un autre de ses chapeaux.

La mission de la BPAO est de créer un réseau actif et engagé de médecins noirs en formation et en exercice, d’offrir du perfectionnement professionnel et d’améliorer la santé des Ontariens noirs. Cela dit, la présidente indique que l’association travaille surtout à défendre les droits des étudiants et des médecins noirs victimes de racisme.

S’appuyant sur la relation déjà établie entre la BPAO et Gestion financière MD Inc. (MD), MD et la Banque Scotia, en collaboration avec l’Association médicale canadienne (AMC), ont récemment annoncé une contribution d’un million de dollars sur cinq ans pour financer la BPAO dans le cadre d’une entente d’affinité de 115 M$ sur dix ans pour aider les médecins, les étudiants et les communautés servis un peu partout au pays.

« Nous roulions à vide depuis très longtemps, et ce financement nous permet enfin de faire le plein, tant collectivement que concrètement », ajoute la Dre Nnorom (photo couverture).

À la faculté de médecine de l’Université de Toronto, l’association a réussi à mettre sur pied un programme de candidature des étudiants noirs afin de rendre les admissions plus inclusives. Les candidats noirs y sont soumis aux mêmes critères, souligne la Dre Nnorom, ajoutant que l’idée est d’être plus sensible à la culture et plus inclusif. Depuis le lancement du programme, le nombre d’étudiants noirs inscrits à cette faculté est passé de six, il y a quatre ou cinq ans, à 26 lors de la dernière inscription. De plus, la BPAO a contribué à la mise en place d’un réseau d’étudiants noirs afin d’assurer un mentorat et de promouvoir l’égalité des chances dans le domaine de la gestion.

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« Pour la première fois de ma carrière, j’ai l’impression qu’on nous écoute et qu’il est possible d’améliorer les choses. »

– Dre Onye Nnorom, présidente de la Black Physicians’ Association of Ontario

L’amélioration de la santé des Ontariens noirs fait depuis toujours partie du mandat de la BPAO, et récemment, l’association a dû défendre les droits des communautés noires pour éviter qu’elles soient négligées durant la pandémie (tests, vaccination, ressources). Selon le rapport de septembre 2020 de Statistique Canada, ce sont les communautés noires qui sont les plus touchées par la COVID-19 : plus des trois quarts des Canadiens noirs disent qu’ils ne recevront sans doute pas le vaccin.

« Beaucoup de médecins noirs d’expérience constatent qu’on s’attend maintenant d’eux qu’ils défendent les droits de leur communauté, qu’ils fassent de la sensibilisation sur le vaccin, et qu’ils donnent le vaccin dans le respect des particularités culturelles », explique la présidente, qui souligne que l’entente d’affinité contribuera à amplifier le travail de l’association et à lutter contre l’épuisement professionnel des médecins en leur offrant la possibilité de s’entraider.

« Pour la première fois de ma carrière, j’ai l’impression qu’on nous écoute et qu’il est possible d’améliorer les choses. Collectivement, nous sommes épuisés, mais nous avons de l’espoir pour nos communautés et nos étudiants, et aussi pour l’état des soins de santé et l’évolution de la santé publique. »

« Le bien-être des médecins est essentiel à la qualité des soins de santé au Canada, et nous reconnaissons qu’il faut en faire davantage, surtout pour les groupes confrontés à des inégalités, souligne Daniel Labonté, président et chef de la direction de MD. Nous sommes heureux de financer la BPAO et sommes convaincus que son travail améliorera l’inclusivité des milieux médicaux, et donc des soins de santé pour tous les Canadiens. »