Ci-dessus : Des participants à un atelier sur le leadership offert par la LALA au Mexique en 2019.  

L’objectif de cet organisme à but non lucratif est de développer une nouvelle génération de jeunes leaders, en ayant recours à des étudiants-ambassadeurs, des partenariats stratégiques et des campagnes sur les médias sociaux pour leur donner les outils qui les aideront à changer les choses qu’ils souhaitent voir évoluer.

«Nous trouvons des jeunes qui ont un grand potentiel et qui sont engagés, qui appartiennent la plupart à des communautés marginalisées depuis longtemps, et nous leur donnons accès à des programmes de leadership transformateurs,» explique Diego Ontaneda Benavides, co-fondateur de la LALA (Latin American Leadership Academy)

Diego Ontaneda Benavides headshot

Diego Ontaneda Benavides, co-fondateur de la LALA


Chaque année, environ 500 jeunes leaders sont choisis parmi les 20 pays de l’Amérique latine participants de la LALA. L’organisme offre autour de 20 ateliers de leadership, en personne et en virtuel, en trois langues, pour les aider à développer des compétences en matière d’entrepreneuriat, d’innovation sociale, d’apprentissage socioémotionnel, de pensée critique, et plus encore.

À ce jour, l’organisme à but non lucratif a permis d’habiliter 2 400 jeunes leaders provenant de 20 pays de l’Amérique latine. Parmi les participants, 70 % d’entre eux appartiennent à des groupes sous-représentés, soit les ménages à faible revenu, la communauté LGBTQIA+, les Noirs, les Autochtones et les personnes de couleur. Dans le cadre d’un sondage mené en 2023 auprès des participants de la LALA, 93 % d’entre eux ont affirmé que le programme leur a ouvert de nouvelles possibilités et 93 % ont affirmé avoir réussi à établir un réseau qui leur sera utile.

Grâce au financement de ScotiaINSPIRE, le programme est prêt à prendre de l’expansion. En effet, la Banque Scotia s’est engagée à verser 500 millions de dollars sur 10 ans. Sa stratégie met l’accent sur l’impact social et a pour but de favoriser la résilience économique au sein des groupes désavantagés.

Lancement de LALA : de Lima à une vision globale

Ontaneda est né et a grandi à Lima, au Pérou, mais c’est en Afrique du Sud qu’il a découvert l’approche révolutionnaire préconisée par l’African Leadership Academy.

Durant ses études en économie politique et en économie du développement au Williams College dans le Massachusetts, il a eu la chance de collaborer avec l’académie et de voir en application la stratégie derrière le développement de «méta-acteurs de changement».

«Nos pays font face à de trop nombreux problèmes, et ils sont interreliés de façon complexe. Vous pourriez dédier votre vie à régler un problème et ce ne serait pas assez, affirme Ontaneda.

«Au lieu de se pencher sur un seul problème précis, le programme concentre ses efforts sur des personnes qui ont le potentiel de devenir les leaders capables de résoudre les problèmes.» 

Three girls outside with shirts that read "Lead the change"

Des participants de la LALA durant une excursion communautaire dans le cadre d’un atelier en personne au Mexique en 2019. 


L’idée c’est qu’en multipliant le plus possible l’accès au programme, ce sont éventuellement des milliers d’acteurs de changement potentiels qui pourront repenser des systèmes entiers.

Parmi les nombreux problèmes auxquels fait face l’Amérique latine et qui doivent être abordés, Ontaneda a identifié les inégalités de revenus, le manque de scolarité, l’instabilité économique et la pauvreté en milieu rural.

Tout en poursuivant sa maîtrise en administration des affaires à Stanford, Ontaneda et le co-fondateur David Baptista ont mijoté cette idée et ils ont adapté le concept de développement de méta-acteurs de changement à la réalité de l’Amérique latine. Ils ont simplifié le concept, l’ont rendu plus facile à adapter et davantage reproductible. Ils ont piloté le concept en 2017 et un an plus tard, LALA est officiellement né.

«La vision s’articule toujours autour du développement d’une nouvelle génération de leaders qui pourraient résoudre les problèmes les plus criants en Amérique latine… trouver ces leaders, les former et les relier aux bons mentors pour les amener à occuper des postes d’influence,» affirme-t-il.

Libérer le potentiel : sélectionner « LALíderes » 

L’organisme trouve des participants pour ses ateliers partout sur le continent, peu importe les circonstances financières, au moyen de techniques de sélection non traditionnelles. En plus des médias sociaux et des programmes d’ambassadeur, l’organisme cherche dans les écoles, les ONG, les fondations et les organismes communautaires qui sont présents sur le terrain et qui travaillent directement avec les adolescents dans le but de trouver des candidats potentiels.

Ce qui est recherché chez les participants (ou «LALíderes» comme on les appelle affectueusement), c’est surtout le potentiel de leadership, le sens du devoir, les gestes de générosité et l’alignement des valeurs. Comme le rappelle Ontaneda, les participants sont choisis en fonction de leur motivation à changer plutôt qu’en se fondant sur les mesures conventionnelles comme les résultats scolaires, le curriculum vitae ou les notes obtenues aux examens.

«L’histoire de Giullia Jaques Caldeira de Rio de Janeiro, qui a participé à un atelier au Pérou, est un exemple marquant de l’approche que nous préconisons à l’académie», raconte-t-il.  

Giullia Jacques posing with plaque award from Babson College

Giullia Jaques Caldeira reçoit le prix Babson College Outstanding Philanthropic Activity 2021 pour sa participation exceptionnelle à des actions humanitaires.


Elle ne ressortait pas du lot du point de vue scolaire, mais elle faisait preuve d’une passion extraordinaire pour l’entrepreneuriat et la justice sociale.

«Elle vendait du chocolat dans la rue durant les vacances scolaires alors qu’elle n’avait que 14 ans», indique-t-il.

«Je me souviens que lorsque nous lui avons demandé pourquoi elle faisait cela, elle nous a répondu que c’était pour que sa plus jeune sœur n’ait jamais à le faire.» Dans la salle d’entrevue, tout le monde avait la larme à l’œil.

Caldeira a été choisie comme participante, et par l’entremise de la LALA, elle a trouvé l’inspiration et développé les compétences pour mettre sur pied une initiative venant en aide aux femmes incarcérées, qui n’ont souvent pas un accès suffisant aux biens de première nécessité. Elle a fondé l’entreprise sociale Absorvidas, dont l’objectif est de donner des moyens aux femmes incarcérées en leur enseignant comment fabriquer des serviettes hygiéniques réutilisables. Elle a également amélioré son espagnol et son anglais et a été admise avec une bourse complète au Babson College aux États-Unis. Dans le témoignage qu’elle a laissé sur le site web de la LALA, elle a indiqué que son expérience lui a procuré un «sentiment de puissance».

Yasmin Campos Fernandez, une autre participante de la LALA, a connu le programme grâce à des amis de l’école secondaire.

«J’ai eu ma première grande chance avec la LALA à l’âge de 18 ans», raconte-t-elle.

Yasmin Campos participating in panel discussion

Yasmin Campos Fernandez (deuxième à partir de la gauche) lors de sa participation à la discussion sur le soutien aux jeunes qui dirigent des organisations dans le cadre du Global Philanthropy Forum 2023.

 

Son rôle a évolué au sein de l’organisme et elle a fini par occuper un poste à temps partiel comme coordonnatrice des anciens participants au sein du service de l’exploitation. Elle a eu la chance de participer aux réunions avec les partenaires, y compris dans une salle remplie de chefs de la direction à la tête d’organismes à but non lucratif américains.

«Je me suis demandé ce que je faisais avec tous ces gens super intelligents, qui avaient beaucoup d’expérience… mais je leur faisais part de mes opinions et de mes idées et ils m’ont fait sentir sur le même pied d’égalité qu’eux», relate-t-elle.

Campos se souvient d’une occasion exceptionnelle que lui a offerte la LALA.

«J’ai pris part au programme de mentorat offert par la LALA à la communauté des anciens participants. Dans le cadre de ce programme, j’ai rencontré mon mentor, qui étudiait à la Harvard Graduate School of Education. Il m’a invitée à participer à la discussion au Latin American Education Forum de Harvard», explique-t-elle.

Campos a également été remarquée lors de l’allocution qu’elle a prononcée durant l’appel aux dons annuel de la LALA, où elle a raconté son expérience en tant que jeune leader. D’ailleurs, une des personnes qui a écouté son discours, l’actuelle cheffe de la direction de Propel Nonprofits, a invité Campos à travailler avec elle.

«La LALA offre un espace où vous pouvez être vous-même et voir le monde d’un point de vue différent, où vous pouvez être maître de votre vie, peu importe le chemin que vous empruntez», affirme-t-elle.

Santiago Cruz, 20 ans, originaire du Mexique, éprouve le même sentiment.

«Je suis étudiant en sciences actuarielles et en stage chez MetLife, mais la principale leçon apprise à la LALA, c’est que je suis le seul maître de ma vie, et personne d’autre», témoigne-t-il. 

Cruz posing for photograph with two others

Santiago Cruz (au centre) participe au Devcon 2023, un événement pour les développeurs de solutions technologiques.


Cruz a participé aux ateliers, a pris part au processus d’admission des nouveaux participants et est présentement un ambassadeur de la LALA.

 «La LALA m’aide à mettre de la clarté dans mes idées, je n’ai pas vraiment peur de ce qui s’en vient. Je ne veux pas échouer, mais je sais qu’il n’y a rien à mon épreuve», clame-t-il.

Des partenariats efficaces : ScotiaINSPIRE et LALA

Depuis sa création, la LALA a mené ses opérations selon un modèle continental, en desservant plusieurs pays à partir d’un bureau centralisé et en proposant principalement des ateliers en virtuel. Mais cette année, l’organisme a ouvert au Brésil son premier centre national pour recevoir des participants en personne, et le Pérou et le Mexique suivront dans les années à venir.

«Le Pérou devrait être le deuxième pays où un centre de ce genre verra le jour dans les deux prochaines années. Le Mexique pourrait être le troisième… l’idée serait qu’un jour nous aurions, je ne sais pas, 10, 20, 30, 50 LALA réparties dans différents pays. Le concept pourrait être exporté à l’échelle mondiale», déclare Ontaneda.

Selon lui, ce plan d’impact et d’expansion ne pourrait se concrétiser sans le soutien des partenaires organisationnels, comme la Banque Scotia.

«Ce n’est pas tous les jours que nous trouvons de tels partenaires stratégiques, prêts à investir autant dans la jeunesse, selon des modèles axés sur le long terme, affirme Ontaneda. ScotiaINSPIRE est un exemple remarquable de responsabilité sociale d’entreprise accomplie, qui mise sur le discernement et l’empathie.» 

Two people outside in "Lead the change" shirts

Des participants à un atelier sur le leadership offert par la LALA au Mexique en 2019.
 

Stanford insights : redéfinition du leadership

Il a été surpris de toutes les compétences générales qu’il a acquises pendant qu’il poursuivait sa maîtrise en administration des affaires. «Je tombais continuellement sur des concepts hippies de la Californie, à la fois apaisants et légers… soit la pleine conscience, la compassion, l’authenticité, relate-t-il. Il y avait cette notion récurrente d’être authentique et d’essayer de faire le bien autour de soi et dans le monde en général.»

Durant ses études, il se demandait dans quelle classe se donnait le cours de négociation, où l’on apprend à écraser son adversaire. Il était là pour gagner et a été surpris que cette approche beaucoup plus bienveillante soit appuyée par des recherches de pointe.

«J’ai appris que c’est en fait la meilleure façon d’être un leader. Tout le monde y gagne. Cette approche vous amène à être plus efficace en plus de vous rendre plus heureux et en meilleure santé», déclare-t-il.

Ontaneda raconte qu’en Amérique latine, nous n’avons pas du tout la même approche. « Il y a encore beaucoup de gens qui se disent, c’est moi et mon entreprise d’abord, si je peux ignorer l’impact sur l’environnement et m’en tirer, alors je le ferai. Si je peux payer moins, si je peux réduire les prix de mes employés, je le ferai », a-t-il déclaré. C’est ce qu’il souhaite changer.

«Qu’est-ce que j’avais de plus que les autres pour me retrouver à l’intérieur des murs privilégiés de la Stanford Graduate School of Business et pour apprendre tout ce que j’ai appris? Pourquoi ai-je découvert ces notions à l’âge de 30 ans et en Californie? Pourquoi tout cela n’est-il pas plus accessible?»

Il raconte qu’il a puisé dans tous ces apprentissages pour concevoir les programmes de la LALA et qu’il a rendu cette perspective accessible à tous.

«Je peux constater qu’en apprenant de cette façon, ces jeunes leaders peuvent emprunter des chemins complètement différents, que ce soit pour poursuivre une carrière, établir des relations, adopter des façons de travailler, d’étudier, d’être en relation avec les autres», déclare-t-il.