• L’inflation fondamentale au Canada s’est subitement ralentie.
  • Mais on ne parle que d’un mois dans une tendance inflationniste bien ancrée …
  • Attendons-nous à ce que la BdC reste sereine et à ce que les marchés s'affolent.
  • Qui sait si El Niño entre en ligne de compte. 
 
  • IPC canadien, sur un mois, en données non désaisonnalisées//sur un an, en janvier 2024 :
  • Données réelles : 0,0/2,9
  • Banque Scotia : 0,6/3,5
  • Consensus : 0,4/3,3
  • Auparavant : -0,3/3,4
  • Inflation fondamentale, sur un mois, en données désaisonnalisées et annualisées//sur un an, en janvier 2024 :
  • IPC en moyenne tronquée : 1,2/3,4
  • IPC en médiane pondérée : 1,7/3,3

Il ne s’agit que d’un mois. Restons calmes. C’est la déclaration à laquelle je m’attendrais de la part de la Banque du Canada qui pourrait peut-être évoquer de nouveau « les hauts et les bas » des mesures adoptées, comme l’a jadis déclaré l’un de ses sous‑gouverneurs.

Toujours est-il que ce n’est pas ce que font les marchés en réaction aux statistiques anémiques de l’inflation par rapport à ce à quoi tout le monde s’attendait, et je ne suis pas vraiment enthousiasmé par ce faux pas. Cette surréaction des marchés n’est guère étonnante en raison a) des basculements dans les positions sur les marchés et b) de la plus grande sensibilité des marchés aux statistiques, dans leur réaction aux indicateurs qui ont à la fois plus augmenté et baissé qu’attendu.

Les détails

Les deux baromètres de base de prédilection de la BdC ont atterri nettement plus en douceur par rapport à la récente tendance, et la détente a été de grande envergure. L’IPC en moyenne tronquée a gagné à peine 1,7 % sur un mois en données désaisonnalisées et annualisées en janvier, et l’IPC en moyenne tronquée pondéré a augmenté d’à peine 1,2 % (graphique 1). Il va de soi que ce sont des chiffres apathiques. En fait, ce sont les résultats les plus apathiques depuis mai 2020 (médiane pondérée) et décembre 2020 (moyenne tronquée). L’IPC de base traditionnel (hors aliments et énergie) a lui aussi été exceptionnellement léthargique (graphique 2).

Graphique 1 : La moyenne de l'IPC-tronqué et la médiane pondérée de l'IPC au Canada; Graphique 2 : L'inflation fondamentale* au Canada

Or, ces résultats s’inscrivent dans la foulée des chiffres de 4,7 % et de 4,8 % du mois précédent, selon les mêmes indicateurs de la moyenne tronquée et de la médiane pondérée respectivement, et ce sont les résultats les plus élevés depuis août. Les graphiques 3 et 4 font état d’une baisse des prix des biens de base et des services.

Graphique 3 : L'inflation des biens au Canada; Graphique 4 : L'inflation des services au Canada

Le graphique 5 indique ce qui faisait ou non partie de l’IPC en moyenne tronquée en janvier.

Graphique 5 : Constituantes pour le seul mois de janvier comprises et exclues dans l'IPC-tronquée, indicateur de l'inflation fondamentale de la Banque du Canada

La Banque du Canada recherche une tendance plus convaincante. Un mois ne suffit pas pour abaisser les taux; il faut savoir qu’il s’agit d’une réversion de la moyenne d’un chiffre antérieur explosif pour l’instant et qu’il faut attendre une meilleure confirmation. Les moyennes sur trois et six mois s’établissent aujourd’hui aux alentours de 3,25 % sur un mois en données désaisonnalisées et annualisées.

C’est pourquoi il se peut que nous venions à peine d’entamer la phase 1 de l’évaluation des progrès sur le front de l’inflation fondamentale du point de vue de la BdC qu’elle communique depuis l’automne dernier. La phase 1 oblige à réunir les statistiques probantes et soutenues confirmant que l’inflation sous-jacente revient sur la cible de 2 %. La phase 2 oblige à confirmer que cette tendance sera durable. La phase 3 pourrait alors permettre d’amorcer la discussion pour savoir quand on abaissera les taux si les phases 1 et 2 se déroulent bien. Les données d’un seul mois ne sont guère éloquentes sur ce processus. En surréagissant, on pourrait sanctionner les marchés dans leurs points faibles compte tenu du risque d’inflation chronique au Canada.

Ceci dit, je suis surpris par l’ampleur de la léthargie des prix en janvier.

  • Les prix des vêtements et des chaussures, qui perdent généralement ‑0,1 % en janvier depuis quelques années, ont cette fois reculé de ‑3,9 %.
  • Les prix des loisirs, de la formation et de la lecture gagnent généralement en moyenne 0,7 % environ sur un mois en données non désaisonnalisées; or, cette fois, ils ont plongé de ‑0,7 %. Le graphique 6 fait la ventilation de cette constituante.
Graphique 6 : Répartition de l'évolution mensuelle dans la catégorie de l'IPC des loisirs, de la formation et de la lecture
  • Les prix des billets d’avion ont reculé de ‑14 % sur un mois en données non désaisonnalisées dans un mois de janvier typique; or, ils ont baissé de 24 % en janvier dernier.
  • Les prix des voitures montent généralement de +1,5 %; cette fois, ils ont toutefois dérapé de ‑0,1 %.
  • Dans les restaurants, les prix augmentent généralement de 0,6 % sur un mois; cette fois, ils ont toutefois chuté de 0,1 %.
  • Dans plusieurs catégories de produits alimentaires (viande, produits laitiers et produits de boulangerie), les prix ont été exceptionnellement léthargiques. Pour des raisons politiques?

On pourrait spéculer et dire que cette léthargie s’explique en partie par le phénomène El Niño. Or, la preuve statistique est loin d’être aussi convaincante. Par exemple, il n’a presque pas neigé et la météo a été plus clémente que d’habitude dans d’importantes régions du pays, ce qui a probablement freiné la demande exprimée pour l’équipement des sports d’hiver. Il en va de même des vêtements et des chaussures d’hiver, ainsi que de la demande exprimée pour les voyages dans le sud. Les prix du gaz naturel et du mazout de chauffage domestique, plus anémiques que d’habitude, ont aussi concouru au ralentissement de l’inflation de synthèse.

Le graphique 7 fait état de la preuve statistique des précédents phénomènes El Niño. En extrapolant vraiment les chiffres, on pourrait dire que dans les précédents épisodes les plus violents d’El Niño, les pics de léthargie ont varié chaque fois et se sont enchaînés avec des rebonds. Or, on ne peut pas dire que ce soit convaincant. On pourrait aussi faire valoir qu’il est plus difficile d’évaluer le phénomène El Niño dans l’ère pandémique actuelle.

Graphique 7 : L'impact du précédent El Niño sur l'IPC canadien

Les graphiques 8 à 15 font état des autres constituantes de l’IPC.

Graphique 8 : Les frais de logement s'emballent au Canada; Graphique 9 : La flambée des loyers au Canada; Graphique 10 : IPC canadien : Coût de remplacement par le propriétaire; Graphique 11 : IPC canadien : Transport
Graphique 12 : IPC canadien : Essence; Graphique 13 : IPC canadien : Achat privé de voitures particulières; Graphique 14 : Le transport aérien au Canada selon l'IPC; Graphique 15 : IPC canadien : Prix des aliments

Le graphique 16 donne la ventilation du panier de l’IPC sur un mois, et le graphique 17 fait de même du point de vue des apports pondérés.

Graphique 16 : Évolution mensuelle des catégories détaillées en janvier de l'IPC canadien; Graphique 17 : Contributions des catégories détaillées en janvier dans l'évolution mensuelle de l'IPC canadien

Les graphiques 18 et 19 illustrent les mêmes concepts en chiffres sur un an.

Graphique 18: Contributions des catégories détaillées en janvier dans l'évolution sur 12 mois de l'IPC canadien; Graphique 19 : Évolution sur 12 mois des catégories détaillées en janvier de l'IPC canadien

Enfin, le tableau d’accompagnement comprend d’autres détails, des micrographiques, des indicateurs des écarts types et des écarts de la note z par rapport aux normes.

Tableau 1 : RÉPARTITION DES CONSTITUANTES DE L'INFLATION CA
Tableau 1 : RÉPARTITION DES CONSTITUANTES DE L'INFLATION CA