DEUX COUPS DURS FONT DÉTAILLER LE PLAN DU RETOUR À L’ÉQUILIBRE
- Soldes budgétaires : -6,3 G$ (-1,1 % du PIB nominal) dans l’EF 2024; -11 G$ (-1,9 %) dans l’EF 2025; -8,5 G$ (‑1,4 %) dans l’EF 2026 (graphique 1) — détérioration combinée de 16,8 G$ sur trois ans par rapport à la mise à jour de novembre 2023 (tous les chiffres s’entendent après les dépôts dans le Fonds des générations); déficits structurels projetés aux alentours de -4 G$ (-0,6 %) pour les EF 2027 à 2029. Plan révisé pour l’équilibre budgétaire à annoncer dans le budget de l’an prochain, en visant le retour à l’équilibre d’ici l’EF 2030.
- Dette nette : Haussée à 39 % du PIB nominal pour l’EF 2024, elle devrait culminer à 41 % dans l’EF 2026 avant de baisser peu à peu pour s’établir à 40 % d’ici l’EF 2028 — soit 4 points de pourcentage de plus que projeté dans la mise à jour de novembre 2023 (graphique 2). Cible de réduction de la dette de 30 % du ratio de la dette nette sur le PIB d’ici l’EF 2038 toujours intacte malgré le changement intervenu dans le taux de réduction.
- Pronostics du PIB : Hypothèses sur la croissance réelle abaissées à 0,6 % cette année et augmentant pour passer à 1,6 % l’an prochain. Le PIB nominal devrait, selon les projections, croître de 4,0 % cette année — ce qui est supérieur à la prévision de 3,4 % du plan précédent — et continuer de progresser au rythme de 3,8 % l’an prochain.
- Nouvelle politique : 317 M$ dans l’EF 2024, 1,9 G$ dans l’EF 2025, 2,0 G$ dans l’EF 2026, 8,8 G$ combinés pour la période de l’EF 2024 à l’EF 2029 — dont plus de la moitié est consacrée au financement de la santé et des services sociaux, de l’éducation et des études supérieures, le reste étant affecté au soutien des collectivités et aux priorités économiques.
- Programme de financement : Il devrait atteindre 36,5 G$ dans l’EF 2025 et 32,7 G$ dans l’EF 2026 et s’établir à une moyenne de 27 G$ durant la période de l’EF 2027 à l’EF 2029; le total projeté pour la période de l’EF 2025 à l’EF 2028 est de l’ordre de 18,3 G$ de plus que prévu dans la mise à jour de novembre 2023.
- Le Québec s’apprête à connaître des déficits vertigineux et à supporter une dette plus lourde à l’heure où il encaisse deux coups durs : la stagnation économique et l’augmentation des besoins en dépenses. Si les investissements majeurs consacrés à la fonction publique et aux mesures d’aide annoncées dans les dernières années ont érodé l’avantage budgétaire du Québec, le budget fait état d’attentes réalistes, grâce à des perspectives appropriées et à une réserve pour imprévus de 7,5 G$ sur cinq ans. À nos yeux, les investissements prévus dans ce budget sont bénéfiques pour la croissance à long terme; or, il faut attendre qu’ils portent fruit.
NOTRE PRONOSTIC
Puisqu’on s’attend à une autre année de croissance timorée, la situation budgétaire du Québec est appelée à se détériorer considérablement sur l’horizon de planification, puisqu’elle sera exacerbée par le rehaussement des dépenses dans la fonction publique. Le déficit de l’EF 2024 devrait se creuser plus que prévu auparavant à -6,3 G$ (‑1,1 % du PIB), en raison de la baisse des recettes fiscales et de la réduction du déficit d’Hydro-Québec dans la foulée des sécheresses de l’an dernier — avant de s’inscrire à -11 G$ (-1,9 % du PIB) dans l’EF 2025 — alors qu’il prévoyait auparavant un déficit de -3 G$ (-0,5 %). Par rapport à la mise à jour semestrielle de novembre 2023, les projections des revenus autonomes ont été réduites de l’ordre de 1,3 G$ par an à partir de la période comprise entre l’EF 2024 et l’EF 2026 en raison d’un profil de croissance plus anémique. Les dépenses des portefeuilles sont de l’ordre de 3 G$ de plus par an dans les deux prochaines années, essentiellement en raison de la hausse des dépenses des portefeuilles du fait de l’augmentation de l’investissement dans les services publics.
Un plan révisé pour l’équilibre budgétaire devrait être annoncé dans le budget de l’an prochain, en visant le retour à l’équilibre d’ici l’EF 2030. Le gouvernement entend éliminer le déficit structurel de -4 G$ (soit le solde budgétaire après les dépôts dans le Fonds des générations) jusqu’à la fin de l’horizon de planification en creusant l’écart entre la croissance des recettes et la croissance des dépenses. Le total des dépenses devrait augmenter pour passer à 26,7 % du PIB dans l’EF 2025, en raison du relèvement des dépenses dans les services publics, alors que le total des recettes devrait, selon les projections, baisser pour s’établir à 25,5 % du PIB, en partie du fait des baisses d’impôt récentes (graphique 3). À moyen terme, les recettes devraient augmenter plus rapidement que les dépenses : la croissance annuelle moyenne des recettes (CAMR) atteindra 3,3 % d’ici l’EF 2029, alors que la croissance annuelle moyenne des dépenses s’inscrira à 2,9 %. Or, pour éliminer le déficit, le gouvernement devra accroître l’écart de croissance pour passer de 0,4 point de pourcentage à l’heure actuelle à 1,1 point de pourcentage sur l’horizon de planification.
Le gouvernement prévoit une forte croissance des recettes malgré les violents vents contraires à court terme. Les recettes propres devraient rebondir de 4,7 % dans l’EF 2025 malgré la léthargie de la croissance économique attendue, ce qui aura pour effet de renverser certains manques à gagner de l’EF 2024 en impôts des sociétés et en dividendes d’Hydro-Québec. Les transferts fédéraux sont appelés à fléchir de -6 % dans l’EF 2025 essentiellement en raison d’une baisse de la péréquation qui résulte des changements apportés dans le budget fédéral de 2023. Dans les deux années suivantes, la croissance des recettes est étayée par le rebond de l’économie, qui devrait s’établir à une moyenne de l’ordre de 4,4 % par an.
Les perspectives économiques paraissent sombres, mais réalistes à l’heure où le Québec connaît un brusque ralentissement. La croissance du PIB réel est estimée à 0,6 % cette année, avant de remonter à 1,6 % l’an prochain — ce qui cadre avec nos perspectives actuelles, mais ce qui est un peu plus optimiste que les moyennes du secteur privé. Nous restons optimistes quant à la croissance du Québec cette année : nous nous attendons à ce qu’elle surpasse la croissance réelle estimée de 0,2 % de l’an dernier puisque l’économie prendra de la vitesse lorsque la Banque du Canada commencera à abaisser les taux d’intérêt. Toutefois, des inquiétudes surgissent à propos d’un ralentissement plus brutal si les taux d’intérêt restent élevés. Dans la mise à jour, on a présenté un autre scénario prévoyant une récession en 2024 et dans lequel l’économie du Québec se contracte de ‑0,5 %. L’impact budgétaire potentiel de cet autre scénario est estimé à -1,8 G$ dans l’EF 2025, -751 M$ dans l’EF 2026 et ‑334 M$ dans l’EF 2027. Pour s’assurer d’être prête à une autre détérioration de la situation économique, la planification actuelle fait aussi état d’une généreuse réserve pour imprévus de 1,5 G$ par an pour la période comprise entre l’EF 2025 et l’EF 2029.
Les nouvelles initiatives d’intérêt public se chiffrent à 8,5 G$ sur cinq ans — soit environ 0,3 % du PIB par an, réparti sur la période comprise entre l’EF 2025 et l’EF 2029. Les postes les plus lourds du budget comprennent la provision de 4,9 G$ sur cinq ans pour financer la santé et les services sociaux, l’éducation et les études supérieures. Le budget prévoit un supplément de 2 G$ pour venir en aide aux Québécois et aux collectivités dans la promotion de l’accès au logement et de l’inclusion sociale. La provision de 1,8 G$ consacrée aux priorités économiques s’étend à différentes initiatives, dont le développement des secteurs clés du Québec, la promotion de l’innovation et l’amélioration de la productivité. Le gouvernement prend aussi des mesures pour optimiser son intervention, en améliorant ses efforts de perception des impôts et en adoptant des cibles plus rigoureuses dans certaines mesures de fiscalité des sociétés, ce qui apportera des recettes supplémentaires totalisant 2,9 G$ sur les cinq prochaines années.
L’adoption de nouvelles mesures d’intérêt public, de concert avec l’impact des hausses salariales récemment négociées avec les enseignants et les travailleurs de la santé, a eu pour effet de faire bondir de 4,6 % les dépenses des portefeuilles dans l’EF 2025 (graphique 4). Les nouvelles dépenses sont consacrées à la santé et aux services sociaux, à l’éducation et aux études supérieures, qui devraient croître respectivement de 4,2 %, 9,3 % et 3,5 % dans l’EF 2025. La croissance des dépenses des portefeuilles devrait se ralentir à 2,9 % dans l’EF 2026 et continuer de s’établir à une moyenne de 2,5 % par an dans l’EF 2029, ce qui est généralement inférieur aux gains attendus de la population et de l’inflation au-delà de cette année. Les dépenses des programmes du Québec par habitant restent nettement supérieures à celles de l’Ontario, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique (graphique 5). Les charges de remboursement de la dette devraient rester étales sur les deux prochaines années avant de remonter après l’EF 2026 en raison de l’augmentation du fardeau de la dette du Québec. Si les charges de remboursement de la dette sont appelées à se hisser à plus de 6,7 % des recettes d’ici l’EF 2029, elles restent relativement faibles historiquement.
Pour cadrer avec les importants besoins en infrastructures publiques de cette province, le Plan québécois des infrastructures a été doté d’un supplément de 7,2 G$ pour la période comprise entre l’EF 2024 et l’EF 2033 par rapport au budget de l’an dernier, pour s’établir à une moyenne de 15,3 G$ sur les 10 années suivantes (graphique 6). On s’attend désormais à ce que les dépenses en immobilisations engagées dans le cadre du Plan québécois des infrastructures (PQI) restent élevées à 18,6 G$ dans l’EF 2025 après avoir bondi de 10 % dans l’EF 2024. La vigueur des investissements dans les infrastructures offre la possibilité de muscler la croissance économique à court terme du Québec et d’apporter un certain soutien dans le ralentissement en cours. Le stock de capital public par habitant du Québec a rattrapé celui du Canada et est supérieur à celui de l’Ontario.
Les déficits de plus en plus creux et le relèvement des dépenses en immobilisations alourdissent le fardeau de la dette du Québec (graphique 7). Le ratio de la dette nette sur le PIB du Québec devrait, selon les prévisions, remonter dans les deux prochaines années et culminer à 41 % dans l’EF 2026 — le plus haut sommet parmi toutes les provinces distinctes de Terre-Neuve-et-Labrador. À moyen terme, le fardeau de la dette du Québec devrait, selon les projections, recommencer à baisser grâce à l’amélioration des perspectives économiques, mais en suivant une trajectoire beaucoup plus prononcée que celle qui était prévue auparavant. Le fardeau de la dette est toujours inférieur à ce qu’il était avant la pandémie, et le Québec reste fidèle à son objectif de réduction de la dette nette à 33 % du PIB nominal d’ici l’EF 2033, puis à 30 % d’ici l’EF 2038. Le gouvernement prévoit de prélever 4,4 G$ sur le Fonds des générations dans l’EF 2025 et 2,5 G$ dans l’EF 2026 afin de rembourser la dette et de réduire ainsi les emprunts à contracter. Le solde du Fonds des générations s’établit aujourd’hui à 18,5 G$ (soit 8 % de la dette nette).
De concert avec le profil du déficit de plus en plus lourd, le Québec prévoit un programme d’emprunts beaucoup plus important entre l’EF 2025 et l’EF 2028 — pour une hausse combinée de 18,8 G$ par rapport à la projection de novembre 2023 (graphique 8). Cette province s’attend aujourd’hui à emprunter 36,5 G$ dans l’EF 2025, 32,7 G$ dans l’EF 2026, 28,1 G$ dans l’EF 2027, ainsi que 26,5 G$ dans l’EF 2028 et autant dans l’EF 2029. Depuis le début de l’EF 2024, 34 % des emprunts ont été contractés sur les marchés étrangers — ce qui est supérieur à la moyenne de 27 % des 10 dernières années.
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