Myles Zyblock, stratège principal en placements de Gestion mondiale d’actifs Scotia — qui gère plus de 200 milliards de dollars* pour des millions d’investisseurs au Canada et ailleurs dans le monde — livre ses plus récentes réflexions sur les marchés et sur les placements.
Ce mois-ci, Myles Zyblock étudie l’essor des actions liées à l’intelligence artificielle et s’inspire des leçons tirées du boom technologique pour déterminer comment les choses pourraient évoluer.
Le début du boom technologique dans les années 1990 peut être attribuable au premier appel public à l’épargne de Netscape Communications inc. en 1995. La société, qui a créé le tout premier logiciel de navigation sur Internet adopté à grande échelle, a vu le cours de son action doubler le premier jour de négociation. Cet événement a eu l’effet d’un coup de canon symbolisant un changement radical sur le marché. Comme Hyman Minsky (un économiste américain réputé pour avoir étudié les caractéristiques des fluctuations du marché) aurait pu le dire, cette technologie perturbatrice a créé un « déplacement » et a suscité l’enthousiasme de tout le monde.
Le lancement de ChatGPT en novembre 2022, un agent conversationnel utilisant l’intelligence artificielle (IA) conçu par OpenAI à partir du transformeur génératif pré-entraîné (GPT), pourrait représenter un déplacement semblable à celui causé par Netscape au milieu des années 1990. De nombreux analystes estiment que l’IA générative (des systèmes capables de générer du texte, des images ou d’autres médias en réponse à des invites) sera l’une des innovations les plus importantes des prochaines décennies. Elle stimulera notamment la productivité partout dans l’économie mondiale. Même si OpenAI est une société privée, son influence s’est fait sentir sur le marché boursier public. Les sociétés d’IA non diversifiées, celles qui investissent dans des applications d’IA générative ou qui en développent, et les fournisseurs de semi-conducteurs pour les puces d’IA à performance élevée sont touchés par l’effervescence.
L’enthousiasme entourant le dernier grand boom technologique a duré jusqu’au début de l’an 2000, soit près de cinq ans, ce qui a poussé les valorisations boursières à des sommets inégalés. Si ChatGPT marque le début d’une ère d’innovation similaire, l’essor des valorisations des actions connexes ne fait que commencer. En raison du large éventail d’estimations, il est difficile d’évaluer la taille du marché mondial de l’IA. Mais une chose est sûre : les importants taux de croissance annualisés auxquels on s’attend pour ce marché ne manqueront pas de susciter l’intérêt d’un grand nombre d’investisseurs.
L’engouement créé par l’IA
L’indice Nasdaq, à forte teneur technologique, a affiché une progression de près de 40 % immédiatement après le lancement de la version gratuite de ChatGPT à la fin de 2022. Ce rendement semble être plus qu’une simple coïncidence.
Peu de temps après le lancement de ChatGPT, nombre d’articles sur les possibilités offertes par l’IA ont été publiés dans la presse commerciale et financière. Les entreprises, particulièrement celles des secteurs les plus touchés par l’IA, ont commencé à parler de ses avantages lors de leurs conférences téléphoniques sur les bénéfices. Les bonnes nouvelles concernant cet outil technologique se répandent rapidement.
L’influence de l’IA sur la dynamique du marché
L’indice S&P 500 a bondi d’environ 15 % depuis le début de l’année, déjouant les prévisions de nombreux analystes qui s’inquiétaient des gains des sociétés et de la santé de l’économie mondiale. Cette année, la majeure partie des gains de l’indice est attribuable à une hausse d’environ 50 % générée par un petit groupe d’actions directement liées à la technologie de l’IA. Les rendements produits par les entreprises restantes (96 %) ont été beaucoup plus faibles, de l’ordre de 3,5 % à 4,0 % depuis le début de l’année.
La récente dynamique de marché semble correspondre à une base d’investisseurs qui est à la fois préoccupée par la macroéconomie et intéressée par le potentiel prometteur de l’IA.
Les considérations relatives aux valorisations
Après la flambée des cours, le panier d’actions centrées sur l’IA de l’indice S&P 500 se négocie à 29 fois les bénéfices prévisionnels sur 12 mois. Il s’agit d’une prime de valorisation de 50 % pour l’indice et de 71 % par rapport à l’univers des actions non liées à l’IA.
Les ratios cours/bénéfice plus élevés des entreprises ayant recours à l’IA constituent un petit prix à payer si les taux de croissance annualisés estimés par les analystes du secteur (supérieurs à 20 %) se concrétisent au cours des cinq à sept prochaines années.
À l’heure actuelle, il est difficile de déterminer à quel point cette technologie sera répandue ou utile dans un contexte professionnel. Cette incertitude se reflète clairement par le large éventail d’estimations formulées par les analystes de Wall Street et d’autres consultants sectoriels quant à la taille et à la croissance du marché ciblé de l’IA. Cependant, l’opinion dominante est que cette technologie deviendra rapidement une importante occasion d’affaires dans les années à venir.
Une bulle d’investissement?
Certains investisseurs commencent à se demander si l’évolution récente des cours de certaines entreprises pourrait mener vers une bulle de valorisation. Pour répondre à cette question, nous avons examiné la distribution des valorisations boursières aux États-Unis à l’aide du ratio cours/vente, et ce, pour trois périodes différentes : 1) la fin de l’année 1995, ou peu après le premier appel public à l’épargne de Netscape, qui, selon beaucoup de personnes, a marqué le début du boom technologique des années 1990; 2) la fin de l’année 1999 qui, avec le recul, a défini la phase finale de ce boom technologique; et 3) l’époque actuelle. Les valorisations extrêmes que nous voyons aujourd’hui ont dépassé celles observées en 1995, mais n’arrivent pas à la cheville de ce que nous avons vu à la fin de 1999, juste avant l’effondrement.
Myles Zyblock est un éminent stratège nord-américain, réputé pour ses réflexions sur les placements, qui font appel à la finance et à la psychologie pour capter les points d’inflexion majeurs sur les marchés financiers. Il a plus de 25 années d’expérience dans l’encadrement et les conseils sur la répartition des actifs pour un ensemble varié de conseillers auprès des institutions et des particuliers dans le monde entier. Il est entré au service de l’entreprise en 2013 comme stratège principal en placements et travaille en étroite collaboration avec l’équipe de gestionnaires des placements. Son expérience s’étend à différentes catégories d’actifs et régions géographiques.
*Total des actifs confiés aux professionnels des placements enregistrés de Gestion d’actifs 1832 S.E.C. Gestion mondiale d’actifs Scotia comprend Gestion d’actifs 1832 S.E.C., société en commandite dont le commandité est détenu en propriété exclusive par La Banque de Nouvelle-Écosse.
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