Préoccupés par la qualité, l’accessibilité et l’abordabilité des services de soins de longue durée, de plus en plus de Canadiens souhaitent vieillir à la maison. Or, pour bon nombre d’entre eux, cet objectif n’est pas réaliste sur le plan financier. Sans économies supplémentaires, le coût élevé des soins, combiné au prolongement de l’espérance de vie, pourrait se traduire par des besoins non satisfaits pour de nombreux Canadiens. 

Telle est la conclusion d’un nouveau rapport rédigé par Rebekah Young, chef, Inclusion et résilience économiques à la Banque Scotia. Le rapport, intitulé Repenser la retraite dans une ère de longévité, indique qu’il est nécessaire d’établir un cadre stratégique qui «élimine les structures verticales dans l’ensemble des soins de santé, des soins de longue durée et de la sécurité financière et qui repose sur un plan budgétaire crédible».

Selon le rapport, améliorer les systèmes «fragmentés et en silos» de la santé et des soins de longue durée, qui mettent l’accent sur les types de soins les plus coûteux et les moins recherchés, serait un bon début.

Mais il est tout aussi important de repenser les systèmes de revenus de retraite qui obligent les gens à vider leur compte d’épargne plus tôt qu’ils ne le voudraient, même si leur espérance de vie est plus longue que jamais. Les filets de sécurité sociale actuels ont leur utilité, mais comme ils manquent de ressources, ils ne seraient pas en mesure d’appuyer le vieillissement à domicile. Tandis que les coffres de l’État sont mis à rude épreuve en raison du vieillissement de la population, une meilleure analyse des moyens visant à établir des services de soutien plus vastes pourrait accentuer la pression d’épargner sur les personnes qui ne sont peut-être plus admissibles, affirme le rapport.   

Le vieillissement de la population canadienne et le prolongement de l’espérance de vie moyenne sont bien connus, tout comme les coûts des soins de santé prodigués aux personnes âgées (même si les personnes âgées composent 19 % de la population, elles représentent environ 45 % des dépenses en santé). Mais le rapport des Études économiques de la Banque Scotia va plus loin: il examine la quantité de soins supplémentaires dont les gens pourraient avoir besoin pour vieillir à la maison, ainsi que le coût potentiellement astronomique de ces soins, un aspect auquel la plupart ne sont pas préparés financièrement.

Selon un sondage cité dans le rapport, moins d’un tiers des Canadiens s’attendent à vivre avec un handicap plus tard dans leur vie, même si le taux d’invalidité autodéclaré des personnes âgées de plus de 75 ans est près de 50 %. Par ailleurs, près de la moitié des personnes interrogées croient que les coûts des soins à domicile pourraient se chiffrer à moins de 1 100 $ par mois.

Cela «représenterait moins d’une heure d’aide par jour d’après les tarifs des agences, soit environ 40 $ l’heure», indique le rapport. «L’Association médicale canadienne (AMC) fixe comparativement à 22 heures par semaine le niveau de soins qui permet aux patients de rester à la maison au lieu de séjourner dans un établissement de soins de longue durée, ce qui reviendrait à peu près à 3 500 $ par mois: il s’agit probablement d’un minimum, puisque ce chiffre ne tient compte que de l’aide générale, et non des services de soins de santé. À l’extrême, les soins permanents à la maison se rapprocheraient plutôt de 30 000 $ par mois.»

Selon le même sondage, moins d’un tiers des Canadiens tiennent compte des soins de longue durée lorsqu’ils pensent à la retraite, et seulement 10 % ont mis des fonds de côté à cet égard. Nombre d’entre eux devront peut-être utiliser leur maison comme actif à la retraite, et les éternels locataires atteindront probablement l’âge de la retraite sans guère de fonds propres de quelque type que ce soit.

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Vieillir à la maison est avantageux pour les ménages comme pour les gouvernements; toutefois, les partis pris dans les politiques penchent pour l’orientation la plus coûteuse.

Rebekah Young, chef, Inclusion et résilience économiques à la Banque Scotia

«Par défaut, la majorité s’en remettrait à l’aide de l’État — du point de vue des finances, de la santé et des soins de longue durée — même si on croit que le niveau, l’accessibilité et la qualité des soins accusent d’importantes lacunes», indique le rapport.

En parallèle, la demande continue de s’intensifier. L’Association médicale canadienne prévoit que les coûts des soins de longue durée (en établissement et à domicile) pour les gouvernements passeront de 33 milliards de dollars par an à 60 milliards de dollars par an d’ici 2031. Ces chiffres ne tiennent pas compte des 75 % des besoins satisfaits de manière informelle à domicile, comme l’aide offerte par les membres de la famille et les amis.

«Les services d’aide non assurés à la maison musclent la demande de soins en établissement. L’ICIS [Centre canadien d’information sur la santé] estime que 10 % des résidents bénéficiaires des soins de longue durée pourraient rester à la maison et profiter de l’aide voulue. Puis, la demande chronique insatisfaite dans les foyers de soins de longue durée explique qu’il y ait plus de personnes âgées dans les hôpitaux. En Ontario par exemple, plus de 15 % des lits dans les hôpitaux sont occupés par des personnes âgées qui se situent à un niveau de soins alternatif.»

«Vieillir à la maison est avantageux pour les ménages comme pour les gouvernements; toutefois, les partis pris dans les politiques penchent pour l’orientation la plus coûteuse.»

En l’absence d’importantes réformes politiques, la plupart des Canadiens devraient envisager de créer un plan financier qui tient compte de leur état de santé afin de conserver la possibilité de vieillir à la maison, explique le rapport.

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