D’aussi loin qu’elle se souvienne, Tamera Froese a toujours voulu faire carrière dans un domaine où elle pourrait aider les gens.
« Je ne savais pas ce que je ferais exactement, dit-elle, mais je savais que je voulais aider les autres parce que j’avais reçu moi-même beaucoup d’aide. »
Mme Froese semblait être en bonne voie de réaliser son rêve après avoir obtenu un baccalauréat en écologie humaine, qu’on appelle aujourd’hui « sciences familiales », de l’Université du Manitoba, avec spécialisation dans le développement et la santé mentale des enfants et des jeunes dans un contexte de violence familiale. Or, après ses études, à la recherche d’un emploi à temps plein, elle a vite compris qu’elle devrait détenir un permis de conduire et avoir accès à un véhicule. Malvoyante depuis sa naissance, elle savait qu’elle ne pourrait remplir aucune de ces conditions.
Ce revers n’est pas venu à bout de la détermination de Mme Froese, dont les parents lui avaient appris à défendre ses intérêts et à être indépendante. Elle est donc demeurée optimiste et a continué de croire qu’elle était promise à une belle carrière, avec l’aide de la technologie, malgré une certaine perte d’audition et ses 12 affections oculaires – la principale étant la dystrophie des cônes et des bâtonnets, un trouble rétinien héréditaire relativement rare qui entraîne une perte de la vision centrale et périphérique.
Mme Froese a d’abord obtenu un poste d’adjointe administrative à la Fondation INCA à Winnipeg, mais son attention s’est vite tournée vers le programme Ouvrir les portes du travail de l’organisation. Elle avait entendu parler de cette occasion de soutien professionnel durant un stage d’études au sein des Services d’intégration communautaire des personnes handicapées du Manitoba.
« Je suis en voie d’obtenir une certification en gestion des ressources humaines, dit-elle, tout en travaillant comme coordonnatrice du programme Ouvrir les portes du travail. »
Son objectif est de retourner aux Services d’intégration communautaire des personnes handicapées. « Je veux y retourner parce que le temps que j’y ai passé m’a montré à quel point je pouvais changer la vie de personnes souffrant de divers handicaps. »
Le programme Ouvrir les portes du travail de la Fondation INCA permet aux employeurs d’accéder à un bassin de talents novateur composé de Canadiens aveugles ou malvoyants, et offre aux personnes qui cherchent un emploi des ateliers de préparation au travail, de la formation technologique et des occasions de mentorat; il propose également des emplois à temps plein et à temps partiel, des stages rémunérés et des programmes de retour au travail chez des employeurs partenaires. La Fondation INCA, fondée en 1918, est un organisme national voué au service des personnes ayant une déficience visuelle; elle offre des programmes novateurs gratuits et défend les intérêts des personnes touchées par la cécité, leur permettant de réaliser leurs rêves et d’éliminer les obstacles à l’inclusion.
Il ne faut pas toujours beaucoup d’argent pour répondre aux besoins d’un employé aux prises avec un handicap physique. Il suffit parfois de cliquer sur quelques boutons.
La Banque Scotia s’est engagée à verser 1,268 million de dollars à l’organisation pour soutenir sa mission et fournira 90 000 $ supplémentaires en tant que commanditaire national du Congrès Points de connexion sur l’éducation, la technologie et l’emploi pour les personnes ayant une perte de vision. Le partenariat avec la Fondation INCA est un programme signature de ScotiaINSPIRE, une initiative de la Banque visant à investir 500 M$ sur 10 ans pour promouvoir la résilience économique des groupes défavorisés.
« Le parcours professionnel de Tamera Froese est un bon exemple de la façon dont le programme Ouvrir les portes du travail offre aux personnes ayant une perte de vision des occasions de réseautage, de formation et de placement afin d’améliorer considérablement leurs perspectives d’emploi, a déclaré Meigan Terry, première vice-présidente et chef, Impact social, Durabilité et Communications, Banque Scotia. Nous sommes fiers de soutenir la Fondation INCA dans ses efforts pour améliorer l’inclusion économique des personnes ayant une perte de vision et les aider à surmonter les obstacles à l’emploi. »
Depuis le début de la pandémie, trouver un emploi et le conserver n’est facile pour personne, mais pour les personnes handicapées, le défi est encore plus grand. Selon la Fondation INCA, près de 15 % des Canadiens en âge de travailler ayant une perte de vision sont sans emploi (soit le triple du taux pour l’ensemble de la population). L’organisme a interrogé les participants au programme Ouvrir les portes du travail à cet égard, et 36 % ont indiqué avoir perdu leur emploi (temporaire ou permanent) ou vu leurs heures de travail réduites depuis mars 2020. Cela a eu pour effet de tripler le bassin de talents du programme qui dépasse maintenant mille personnes à la recherche de travail dans divers domaines, comme la gestion de compte, le service à la clientèle, l’éducation, les services financiers, les services de santé, les ressources humaines, les technologies de l’information et la vente au détail.
Il y a cependant une lueur d’espoir.
« Étant donné que le manque d’accès au transport – l’obstacle le plus important – a été éliminé dans bien des cas, indique Angela Bonfanti, cheffe des opérations, Fondation INCA, et que les employés ont plus de choix quant à leur lieu de résidence, nous pensons que le modèle à distance pourrait permettre à un plus grand nombre de personnes ayant une perte de vision de trouver des emplois partout au Canada.
« Mais nous savons aussi que l’isolement accentué durant la pandémie a eu un impact négatif au sein de notre communauté. Il est temps que les attitudes à l’égard des capacités des personnes malvoyantes changent, et cela ne sera possible que si davantage de personnes travaillent aux côtés d’employés aveugles, malvoyants ou sourds et aveugles, à distance et en personne. »
L’expérience de Mme Froese lui a appris que, mis à part quelques exceptions comme la Fondation INCA et les services gouvernementaux, les employeurs doivent être mieux informés quant à l’adaptation aux personnes handicapées.
« Il ne faut pas toujours beaucoup d’argent pour répondre aux besoins d’un employé aux prises avec un handicap physique, précise-t-elle. Il suffit parfois de cliquer sur quelques boutons. »
Elle suggère aux employeurs de s’adresser à la Fondation INCA ou aux Services canadiens de l’ouïe, ou à toute autre organisation qui défend les intérêts de personnes handicapées, pour obtenir de plus amples renseignements – ou de simplement demander aux candidats à l’emploi ce dont ils ont besoin. De petits changements peuvent souvent aider un employé ayant une perte de vision ou d’audition. Mme Froese dit que la majeure partie de son travail s’effectue à l’ordinateur et qu’elle n’a besoin que d’un outil loupe, accessible sur n’importe quel ordinateur Windows.
« Au sein de la communauté des personnes malvoyantes, dit-elle, neuf fois sur dix, on peut facilement régler le problème. »
Un des apprentissages clés que Mme Froese a retenus du programme Ouvrir les portes du travail de la Fondation INCA concerne la manière de se présenter en entrevue. Il s’agit notamment de prêter attention au langage corporel, de faire preuve de confiance en soi et de bien comprendre en quoi les compétences transférables peuvent être utiles pour l’employeur – autant de conseils qui l’aideront à trouver son prochain emploi dans le domaine de l’aide aux personnes handicapées.